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PRES Sorbonne Paris Cité : "Signature de la convention IDEX : Pourquoi il est urgent d’attendre !", tribune de Cécile Sakaï et François Jouve (U. Paris-Diderot), 3 octobre 2012

jeudi 4 octobre 2012

La signature de la convention tripartite Idex État-ANR-PRES SPC est encore suspendue aux acceptations des CA des établissements concernés (Paris 3, 5, 7, 13, IPGP, Sciences po, EHESP, Inalco). Cette signature est contestée dans plusieurs établissements. Nous publions ici une tribune de deux enseignants de Paris 7 qui, après des motions de plusieurs UFR, demandent que le processus fasse l’objet d’un moratoire et soulignent l’escamotage du véritable débat : la fusion des établissements du PRES en une seule entité, hors tout débat.

Ainsi, nous dit‐on, il nous faudrait signer au plus vite la convention IDEX pour fixer définitivement l’engagement de l’Etat, sous peine, si nous nous y refusions, de voir s’évaporer les mannes financières escomptées si nécessaires à l’équilibre de notre budget et au développement de nos projets. Les pressés oubliant de préciser que les "non excellents" se sont vus promettre malgré tout quelques subsides, que la nouvelle ministre a déclaré "Non, aucune université ne sera mise sous tutelle", que les budgets des Equipex et Labex sont sanctuarisés et que l’ANR, représentant de l’Etat, ne s’engage dans cette convention que "dans la limite des fonds dont elle dispose".

D’ailleurs de quels fonds disposera‐t‐elle vraiment ? Mois après mois, le montant du contrat n’a cessé de diminuer. Pour Sorbonne Paris Cité : 1300 millions demandés, 800 promis, soit 27.4 millions d’intérêts par an dont une dizaine sera affectée automatiquement aux Labex ; restera environ 17 millions "libres d’utilisation" pour 8 établissements.
Qu’en sera‐t‐il demain ? On est en droit de s’interroger. Notre ministre répondait récemment dans la presse d’un cinglant : "I have no money back" à l’interpellation du président de Paris 13 qui avait déclaré "we want our money back". Si la ministre a bien confirmé les financements déjà engagés dans les Equipex et Labex, elle s’est bien gardée de dire quoi que ce
soit sur les IDEX, se contentant d’expliquer "qu’elle ne les aurait pas fait de cette manière, dans un esprit de compétition" et qu’il fallait absolument une péréquation territoriale "afin de répartir au mieux les moyens entre universités". Il n’y a pas beaucoup d’argent et il en faut pour tout le monde.
Quoi qu’il arrive, les huit lauréats des IDEX devront sans doute se contenter de moins que prévu, pour qu’aucune université ne soit en faillite. D’autant que les auditions des Assises de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche semblent mettre en avant une politique basée sur des "établissements-têtes de réseau" plutôt que sur des pôles d’excellence confisquant les moyens. Sans compter que l’IDEX coûtera de l’argent à notre communauté universitaire. En effet, chacun des établissements bénéficiaires doit contribuer sur ses fonds au budget de l’IDEX pour un montant identique à celui de la dotation reçue pour l’IDEX, paupérisant d’autant ceux qui ne sont pas dans le fameux Péridex. Pour Paris Diderot, signer la convention lui coûtera ainsi 19 millions d’euros sur 4 ans alors que le budget de l’Université est au plus bas.

Aussi rien ne presse à signer cette convention. Les raisons de cet acharnement à vouloir signer coûte que coûte sont donc à chercher ailleurs.

En fait, cette urgence a pour seul but réel de rendre irréversible l’objectif principal de l’IDEX : faire du PRES une "université unifiée de droit commun". En d’autres termes : un seul CA format loi LRU (modifiée ou pas) pour l’ensemble des 4 universités. C’est-à-dire une gouvernance éloignant plus
encore qu’aujourd’hui les équipes dirigeantes des universitaires. Car, même s’il est proclamé à qui veut l’entendre que tout est ouvert, "l’université fusionnée" est bel et bien le but recherché, le président Berger ayant déclaré à la presse (Educpro mai 2012) par anticipation en mai 2012 "La fusion des
quatre universités est assurée".
Aussi, si la convention IDEX est signée, on nous expliquera ensuite que "l’IDEX est signé, c’est un engagement de notre part. Nous devons respecter notre parole et le contenu de notre projet. Notre projet c’est une université "unifiée" (traduction fusionnée). On ne peut pas revenir là dessus". Et
la boucle sera alors bouclée. Il sera trop tard pour que nous nous exprimions. Tout ceci se sera fait sans aucun débat réel et sincère avec la communauté universitaire, à l’image des dérives autoritaires observées ces derniers mois, la dernière en date étant les arbitrages de l’offre de formation en Master menés par le bureau du PRES et qui préfigurent ce que seraient les pratiques de ce mastodonte incontrôlable démocratiquement.
Nous devons prendre le temps de l’échange et de la véritable collégialité des décisions.
Nous demandons :

- un report de la signature de la convention de l’IDEX jusqu’à que nous ayons une vision claire du nouveau paysage institutionnel (structures, implications territoriales, refonte de la loi LRU et de la gouvernance des universités...) qui émergera des Assises nationales de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche.

- une meilleure organisation et l’intensification d’une consultation démocratique concernant le devenir de notre université, qu’il s’inscrive dans un projet de fusion ou dans celui alternatif d’une fédération d’universités.

Cécile SAKAÏ, Professeur, UFR LCAO François JOUVE, Professeur, UFR Mathématiques