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Le ministère de l’Education recalé par le Conseil d’Etat - Sébastien Rome, blog de Médiapart, 6 juillet 2010

mercredi 7 juillet 2010, par Laurence

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Le Conseil d’Etat vient de suspendre cinq arrêtes organisant le concours de recrutement des professeurs. A la lecture des motivations du Conseil d’Etat, on comprend qu’une fois de plus le ministère a agi dans la précipitation. Portée sur la forme, cette décision précède-t-elle un prochain jugement négatif sur le fond de la réforme de la « mastérisation » ?

La FCPE, le collectif SLU et le syndicat SUD éduc ont entrepris de déposer plusieurs requêtes en référé-suspension devant le Conseil d’Etat concernant notamment les arrêtés d’organisation des prochains concours de recrutements (inscriptions ouvertes, épreuves d’admissibilité en octobre, admission au printemps 2011). Ils ont eu, lors de la première décision sur la forme, gain de cause.

En effet, le Conseil d’Etat a estimé qu’il existait un doute sérieux sur sa légalité des arrêtés et que la condition d’urgence était légitimement invoquée étant donné que «  les dates de clôture des inscriptions et de début des épreuves d’admissibilité [étaient] imminentes ». Ainsi, le juge des référés a prononcé la suspension qui lui était demandée par les organisations requérantes au motif « que ces arrêtés n’avaient pas été précédés de l’avis conforme du ministre chargé de la fonction publique ».

Un oubli. Un simple oubli dans la précipitation. Le ministère de l’Education nationale aurait dû «  obligatoirement » consulter le ministre de la fonction publique d’alors, Eric Woerth. Ce dernier devait « donner un avis favorable à l’ouverture de ces concours. Cet avis est réputé acquis en l’absence de réponse expresse dans un délai de quatre jours suivant la demande d’avis. Or, il ne ressortait pas du dossier que l’avis du ministre de la fonction publique avait été recueilli. ».

Cela ressemble à un camouflet quand on pense qu’en plus de la suspension, le ministère doit verser 1000 euros aux requérants. Dans les prochains jours, c’est une décision sur l’organisation des « stages » des lauréats 2010 qui est attendue.

Une question me vient : mais comment le ministère où il y a le plus de fonctionnaires a pu oublier de demander l’avis du ministre des fonctionnaires ? Est-ce que Bercy commettra la même faute en oubliant de demander à la rue de Grenelle de faire des économies ?

Cette décision du 5 juillet suit une autre du 2 juillet. Voici, ci dessous le communiqué du CNRBE (Collectif national de résistance à Base élèves)

Demande d’annulation de la décision initiale de créer BE, mise en œuvre prématurée avant récépissé de la CNIL, collecte illégale de données sur la santé, annulation de l’interdiction du droit théorique d’opposition des parents, illégalité de la Base Nationale des Identifiants Elèves et le caractère « excessif » de la durée de conservation des données (35 ans)... Telles sont, en quelques mots, les principales conclusions favorables, selon le CNRBE, formulées par le « rapporteur public » lors d’une audience publique qui s’est tenue le 30 juin 2010 au Conseil d’Etat.

Cette audience de jugement est la dernière étape des « recours en annulation » engagés voilà presque deux ans par les isérois Vincent Fristot (parent d’élève) et Mireille Charpy (ancienne directrice d’école ), appuyés par des syndicats (PAS 38 UDAS et SNUipp 38) et la Ligue des Droits de l’Homme, pour faire invalider les fichiers ministériels « Base élèves premier degré » (BE1D) et la « Base nationale des identifiants élèves » (BNIE).

Le « rapporteur public », en droit administratif, est un magistrat qui « expose publiquement, et en toute indépendance, son opinion sur les questions que présentent à juger les requêtes et sur les solutions qu’elles appellent ». A ce stade, ses conclusions ne présagent donc en rien des décisions finales du Conseil d’Etat - qui devraient être connues d’ici environ trois semaines. D’autant que certaines de ses conclusions proposent de donner un délai de 4 mois au ministère de l’Education pour essayer de régulariser la situation.

Reste que ces conclusions confortent la position des requérants, et en particulier celle des directeurs d’école qui ont refusé de ficher leurs élèves et des 2100 parents qui ont déposé plainte contre X pour s’opposer à ce fichage illégal.

Rappel - résumé des 3 requêtes

- Requête par laquelle M. Vincent FRISTOT et autre demandent au Conseil d’État

1. d’annuler la décision implicite du ministre de l’éducation nationale refusant d’annuler les actes et/ou les directives adressés aux recteurs, aux inspecteurs d’académies, aux directeurs d’écoles, relatifs à la mise en place du système « Base élèves premier degré », ensemble, les actes et/ou directives du ministre précité adressés aux recteurs, aux inspecteurs d’académies, aux directeurs d’écoles, relatifs à la mise en place dudit système [...].

- Requête par laquelle M. Vincent FRISTOT et autre demandent au Conseil d’État

1. d’annuler l’arrêté du 20 octobre 2008 du ministre de l’éducation nationale portant création d’un traitement automatisé de données à caractère personnel relatif au pilotage et à la gestion des élèves de l’enseignement du premier degré,

2. de saisir le Conseil Constitutionnel, au titre de l’article 61-1 et 62 de la Constitution et de la constitutionnalité du dernier alinéa de l’article 38 de la loi n° 78-10 du 6 janvier 1978, modifiée, relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés qui porte atteinte aux droits et aux libertés que la Constitution garantit, en particulier par son article 34, renvoi utile au jugement du présent recours pour excès de pouvoir en annulation de l’arrêté précité [...].

- Requête par laquelle M. Vincent FRISTOT et Mme Mireille CHARPY demandent au Conseil d’État

1. d’annuler les actes du ministre de l’éducation nationale portant création et/ou mise en oeuvre d’un traitement automatisé de données à caractère personnel » base nationale des identifiants élèves « , ainsi que les actes de traitement automatisé pris en conséquence, subsidiairement, d’annuler les actes de déclaration du ministre défendeur à la Commission nationale de l’informatique et des libertés relatifs au traitement » BNIE « , s’ils doivent être considérés comme les seuls actes administratifs règlementaires pris pour la mise en oeuvre de la base précitée,

2. d’enjoindre audit ministre, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, de procéder à la destruction de l’ensemble des données déjà collectées dans le traitement » base nationale des identifiants élèves « ,

3. de mettre à la charge de l’État la somme de 1 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Les batailles se gagnent-elles lors de sprints ou de courses de fond ?