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Educ, Réussite, Jeunesse, Recherche : le dédale des ministères - V. Soulé, Blog C’est classe, 19 mai 2012
dimanche 20 mai 2012, par
On attendait un grand pôle Éducation-Jeunesse symbolisant la priorité donnée à la jeunesse par François Hollande. On s’est retrouvé avec trois ministères - un grand dévolu à un homme (l’Éducation), les deux autres moins importants à des femmes (Enseignement supérieur et Recherche d’abord, Sports, Jeunesse, Éducation populaire et Vie associative, ensuite) - , ainsi qu’un intriguant ministère chargé de la Réussite éducative attribué à une femme, placée sous l’autorité d’un homme (à l’Educ).
Trois ministères de plein exercice, plus un rattaché, ce ne serait pas un peu compliqué pour mener une grande politique de la jeunesse ? Pour tenter d’y voir clair, on a pris un cas d’école - c’est le cas de le dire ...
Kevin M. passe un bac général. Mais il s’est pas mal dispersé durant l’année et il n’est pas sûr de l’avoir. Examinons différents cas de figure : Il rate son bac et redouble. Il reste un élève, dépendant du ministère de l’Éducation nationale de Vincent Peillon.
Il bénéficie du soutien d’une association présente dans son lycée pour les maths, son point faible. Là, il passe au ministère des Sports, de la Jeunesse, de l’Éducation populaire et de la Vie associative de Valérie Fourneyron.
Il rate son bac. Et découragé, il ne se lève plus le matin, passe la nuit devant des jeux vidéos.. Bref, il décroche. Problème : est-ce que son cas relève de l’intriguant ministère de la Réussite éducative de George Pau-Langevin ?
Il ne veut plus revenir au lycée, dégoûté des études. Il signe alors un Service civique dans une association. Là, il repasse aux Sports, Jeunesse, Éducation populaire, etc.
Une précision : son lycée de banlieue est classé en éducation prioritaire. Ce lycée entre-t-il dans le périmètre de l’intriguant ministère de la Réussite éducative ?
Autre hypothèse : Kevin M. a son bac ric-rac. Et il entre à l’université. Étudiant, il dépend désormais du ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche de Geneviève Fioraso.
Il a son bac et il est admis en STS (section de technicien supérieur préparant au BTS), son premier choix sur le portail Admission post-bac. Là, c’est un peu compliqué (ici le nouveau gouvernement hérite d’une situation ancienne) : il étudie dans un lycée et ses profs sont payés par l’Éducation nationale. Mais lui est étudiant et relève de l’Enseignement supérieur.
En fait, Kevin n’a pas d’idées précises sur ce qu’il veut faire plus tard. Sinon, cela pourrait encore se corser (il s’agit aussi ici d’un héritage). S’il voulait devenir vétérinaire par exemple, il tomberait sous la tutelle du ministère de l’Agriculture. S’il voulait devenir architecte, sous celle de la Culture. S’il visait une école des Mines ou des Télécoms, ce serait l’Industrie, Polytechnique la Défense, etc.
On ne peut que risquer des hypothèses pour expliquer l’éparpillement gouvernemental au lieu du grand pôle évoqué.
Pour l’Éducation et l’Enseignement supérieur, il y avait deux écoles - c’est le cas de le dire (bis) - au sein de l’équipe Hollande. Certains voulaient garder deux ministères distincts - notamment les présidents d’université, pensant que leur cause serait mieux défendue. D’autres, au contraire, voulaient les regrouper en un seul, estimant que l’un des grands problèmes actuels était la mauvaise articulation entre le lycée et le supérieur - Vincent Peillon était de ceux-là.
On sait par ailleurs que le gouvernement Ayrault est le fruit d’équilibres subtils entre les courants du PS, entre des égos antagoniques, entre les genres, etc. Ce qui incite à la multiplication des postes.
Sur la Réussite éducative - une curiosité de ce gouvernement avec le Redressement productif d’Arnaud Montebourg -, le mystère reste entier. Les explications officielles - du style : "il y a trop d’échec à l’école française, il faut mettre le paquet sur la réussite et ce nouveau poste le symbolise" - sont assez fumeuses. Peut-être l’opportunité de caser une femme pour arriver à la parité historique.
Pour être complète, rappelons que le gouvernement sortant comptait un ministre de l’Éducation nationale, de la Jeunesse et de la Vie associative (Luc Chatel) et un autre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche (Laurent Wauquiez). Les deux n’ayant aucun atome crochu, ils ne se parlaient pratiquement pas.
Pour être vraiment complète, il faudrait ajouter une secrétaire d’État à la Jeunesse et à la Vie associative, dépendant de Chatel. Mais elle était très très discrète (Jeannette Bougrab). Ca n’avait d’ailleurs guère d’importance, les jeunes n’étant vraiment pas la priorité.
Face au saucissonnage des ministères, certains syndicats ont exprimé leurs doutes sur l’efficacité d’un tel dispositif, voire un peu de déception. Une chose est sûre : il faudra arriver à coordonner tout cela.
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