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Suppression de l’histoire-géographie en terminale S : de lourdes conséquences, VousNousIls, 17 juin 2011

vendredi 17 juin 2011, par Sylvie

La réforme des lycées touche par­ti­cu­liè­re­ment l’histoire-géographie. Hubert Tison, secré­taire géné­ral de l’association des pro­fes­seurs d’histoire-géographie, nous pré­sente son asso­cia­tion et fait le point sur l’impact des réformes en cours sur sa discipline.

Entretien complet réalisé par Sandra Ktourza sur le site de VousNousIls

Vous êtes très vigi­lants quant aux pro­grammes. Le 22 avril der­nier s’est ter­mi­née la consul­ta­tion du minis­tère de l’Education natio­nale sur les futurs pro­grammes de ter­mi­nale, à laquelle vous avez par­ti­cipé. Quelle est votre ana­lyse, en par­ti­cu­lier concer­nant la sup­pres­sion de l’histoire-géographie en ter­mi­nale S ?

La réforme des lycées telle qu’elle a été mise en place a intro­duit des dis­po­si­tions nou­velles pour enca­drer les élèves et pour mieux les pré­pa­rer à l’entrée à l’université comme l’aide per­son­na­li­sée ou les domaines d’exploration en seconde, des options en ter­mi­nale. Elle a paral­lè­le­ment dimi­nué la part de savoirs dis­ci­pli­naires, réduit les horaires et à terme le nombre des postes. Mais tout le pro­blème vient pour nous de la sup­pres­sion pré­vue, à par­tir de la ren­trée 2012, de l’histoire-géographie en ter­mi­nale scien­ti­fique. Il faut savoir que 50% des élèves de ter­mi­nale géné­rale sont en S. Nous avons lancé une péti­tion qui a recueilli à ce jour 26 000 signa­tures. L’idée du minis­tère de l’Education natio­nale sous-jacente est de rééqui­li­brer les filières, et en par­ti­cu­lier de réha­bi­li­ter la sec­tion lit­té­raire L. Et de dire : les élèves scien­ti­fiques doivent faire des sciences, et les lit­té­raires des sciences humaines.

Or, depuis que le lycée existe, c’est la pre­mière fois que des élèves de ter­mi­nale n’auront plus cours d’histoire-géographie. De plus, cette mesure s’inscrit dans une réduc­tion glo­bale horaire : on est passé en quelques années déjà de 3h 30 à 2h30 d’enseignement heb­do­ma­daire obli­ga­toire en ter­mi­nale. C’est une grave atteinte à la for­ma­tion géné­rale et civique des élèves de S.

C’est donc en pre­mière que les élèves scien­ti­fiques devront assi­mi­ler leur pro­gramme de bac : un pro­gramme chro­no­lo­gique sur une seule année n’était pas pos­sible. Il a fallu en faire un par thèmes, on a par exemple un thème sur les guerres et un autre sur les tota­li­ta­rismes au sein du même pro­gramme. Cela risque d’emmêler les choses pour les élèves. Le pro­gramme est ambi­tieux, ori­gi­nal, mais sur le ter­rain, très dif­fi­cile à mettre en place !

Il y aura des consé­quences sur l’université : les élèves de S arri­vant en géo­gra­phie, en droit, en sciences-po, en économie...auront des carences dif­fi­ciles à com­bler. Sauf s’ils choi­sissent de prendre l’option d’histoire et de géo­gra­phie mise en place en TS .

La situa­tion semble aussi très com­pli­quée pour les étudiants de mas­ter, futurs pro­fes­seurs d’histoire-géographie, avec des épreuves de CAPES très tôt, en novembre...

En effet, les épreuves écrites du CAPES en novembre ne laissent pas le temps néces­saire à une bonne pré­pa­ra­tion et empêchent pra­ti­que­ment de pré­sen­ter la même année l’agrégation dont l’écrit se passe en avril et l’oral fin juin. Et mener de front la pré­pa­ra­tion d’un concours, d’un mas­ter de recherche et des stages pra­tiques d’enseignement s’avère mis­sion impos­sible. Les épreuves orales du CAPES se passent en juin . Un signe de la dégra­da­tion de la situa­tion est le fait que les étudiants, futurs pro­fes­seurs d’histoire-géographie, ne fré­quentent plus guère les archives. Les archi­vistes nous alertent sur ce fait : les étudiants n’ont plus le temps de faire des recherches aussi appro­fon­dies qu’avant. Quant aux uni­ver­si­tés, on leur demande de s’adapter : c’est par­fois impos­sible, et les pré­pa­ra­tions aux concours ferment tout bonnement.

Pour faire le mas­ter ensei­gnant cor­rec­te­ment, il fau­drait en fait bou­cler son mémoire de recherche, puis pas­ser l’année sui­vante les concours : ce qui porte la sco­la­rité à 6 ans. Quel étudiant peut se le per­mettre, sans cer­ti­tude au bout du compte, avec un concours en fin de cur­sus ? Nombre de jeunes his­to­riens ou géo­graphes ne se tour­ne­ront plus vers les car­rières d’enseignement.