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La semaine en Grande-Bretagne (de notre correspondant SLU)
jeudi 16 juin 2011, par
À transmettre d’urgence à l’Institut Montaigne !!
La semaine a expérimenté la première action significative d’unileaks en Grande-Bretagne, à propos de la surveillance d’étudiants qualifiés « d’extrémistes » à l’université de Nottingham. Les documents déposés sur le site ont donné lieu à un article du Guardian
L’été va aussi être chaud sur le front des frais d’inscription qui entreront en vigueur en 2012-2013. Le gouvernement doit en effet faire face à un effort de financement important des prêts étudiants qui doivent couvrir des frais d’inscription – qui ont été fixés au maximum de £ 9 000 annuels pour une licence par plus de deux tiers des universités.
Le ministre des universités, David Willetts, s’emploie donc à préparer l’opinion aux mesures à venir, en particulier par la recherche d’un vocabulaire « approprié » : « frais » et « prêts » ne semblent plus convenir.
Dans l’esprit du gouvernement, le système mis en place se justifie par un effort vers plus de justice sociale, en particulier pour que l’impôt des pauvres ne finance plus les études des riches. Un intervenant cité dans l’article propose donc d’utiliser une terminologie évoquant un impôt étudiant plutôt que des droits d’inscription.
Ce système s’en rapproche effectivement du fait de sa progressivité face au salaire (les étudiants rembourseront un pourcentage maximal de 9 % de la part de leur salaire excédant le salaire médian de £ 21 000), mais tout cela n’est que de la propagande. En particulier, cela remet en cause l’égalité devant progressivité de l’impôt (puisque, à salaire égal, des anciens étudiants payeraient plus que des non étudiants), et que faire payer plus d’impôts à des gens qui retardent la perception d’un salaire n’est clairement pas une mesure qui va inciter les catégories sociales pauvres à faire plus d’études.
Cet argument de justice sociale, qui a été vendu aux étudiants, peut aussi servir à d’autres usages. Les universités du Pays de Galles avaient prévu de charger elles aussi le montant maximum de £ 9 000, mais l’organisme gallois donnant le feu vert a refusé, en raison d’un volet social (bourses ou rabais pour les étudiants les plus pauvres, etc.) trop « modeste » (liens vers les articles du Times, du Guardian, de la BBC).
La situation du Pays de Galles est complexe, parce que si le gouvernement gallois va continuer de subventionner les études des étudiants gallois, les étudiants anglais, qui représentent une part non négligeable de ceux étudiant au Pays de Galles, ne donnent pas de droit a une subvention pour l’université (sauf pour les sciences), puisque le gouvernement britannique a supprime les subventions. C’est donc à terme une possible faillite pour les universités galloises. Cette situation pourrait se généraliser à l’Angleterre après
la décision d’homologuer ou pas le 11 Juillet les projets de droits d’inscription des universités anglaises.
On commence aussi à avoir des fuites sur la note de cadrage (white paper) qui va tenter de corriger les difficultés de financement liées aux prêts étudiant. La tentation de diminuer le nombre de places étudiantes est très forte, mais le gouvernement ne veut pas donner cette impression. En bref, les places des étudiants ayant obtenu A, A et B aux trois matières prises en compte pour l’entrée à l’université ne serait pas contingentées. Par contre, il
y aurait quotas pour le reste, avec un système d’enchères pour dépasser le quota et la possibilité d’aménagement pour les universités qui décideraient de charger moins de £ 6 000 (une seule pour l’instant voir ici)
À noter que ce projet va a l’encontre de l’argument de justice sociale mentionné plus haut, puisqu’en particulier ce sont les élèves venant des lycées prives qui obtiennent les plus hautes notes aux trois matières prises en compte pour l’entrée à l’université. (Ironie du sort, les étudiants issus du public réussissent cependant mieux une fois qu’ils sont entrés a l’université...)
A lire aussi une analyse intéressante dans le journal Radical Philosophy sur la façon dont les humanités sont utilisées pour tester la viabilité d’un marché universitaire.
Pour l’instant, les études en sciences sont encore subventionnées par le gouvernement – sans doute du fait d’un biais industrialiste et aussi parce qu’elles sont délaissées par les étudiants. Ce sont donc les arts, les humanités, et les sciences sociales qui servent de ballon d’essai aux réformes en cours, dont on anticipe qu’elles finiront par étrangler avec le cordon de la bourse les universités publiques récalcitrantes.