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"Grève à la fac : et les exams ?", par Marie Piquemal, "Libération", 2 avril 2009

jeudi 2 avril 2009, par Elie

Pour lire cet article sur le site de Libération.

Le mouvement des enseignants-chercheurs s’éternisant, les étudiants commencent à s’inquiéter pour leurs diplômes. Revue des scénarios possibles.

Neuf semaines de grève, et toujours pas de sortie de crise. Nouvelle manif cet après-midi, facs toujours bloquées… Le mouvement des enseignants-chercheurs s’enlise. Dans ce contexte, quel est l’état d’esprit des étudiants, embourbés dans un des conflits les plus longs de ces dernières années ?

A l’approche des examens, ils sont encore nombreux à soutenir le mouvement mais l’inquiétude grandit. La validation des diplômes est-elle menacée ? Y aura t-il un report des examens, si oui quand ? Beaucoup d’interrogations et peu de réponses pour le moment.

« Tant que le conflit n’est pas terminé, on ne peut pas savoir, rien n’est défini. » Voilà ce que répond à longueur de journée Marine, représentante des étudiants en médiation culturelle à Paris III, à tous ses camarades inquiets. Elle assure : « L’année universitaire n’est pas foutue. D’une manière ou d’une autre, les profs et l’administration trouveront un moyen de nous évaluer. »

Plusieurs scénarios sont d’ores et déjà envisagés, variables d’une université à l’autre et même d’un prof à un autre.

Hypothèse 1 : rattrapage des cours et report des examens

A Montpellier III par exemple, bloquée pendant trois semaines, la présidente de l’université a décidé de reporter la date des examens. Au lieu de terminer leur semestre fin avril, les étudiants clôtureront l’année avec les examens fin mai. A Paris IV, on évoque aussi un report jusqu’à mi-juin, avec une session de cours intensifs après les vacances de Pâques (si le mouvement prend fin d’ici là).

Cette solution ne résout pas tout. Certains étudiants ont pris des engagements ailleurs : concours, jobs d’été ou stages en entreprise. « Aller expliquer ça à un employeur ! Pas évident. C’est un coup à se faire mal voir », confie une étudiante.

Autre problème, pointé du doigt par l’administration de Montpellier III : « Tous les Erasmus (étudiants étrangers) qui ont des billets d’avions de longue date pour rentrer chez eux. On a ouvert un guichet pour gérer tous ces cas particuliers. Et il y en a beaucoup. 50 cas, rien que ce matin. »

Hypothèse 2 : le « semestre blanc »

Le principe est simple mais radical : 10 de moyenne pour tout le monde et on n’en parle plus. C’est un scénario évoqué ici ou là dans les facs, mais personne n’y croit vraiment.

Hypothèse 3 : examen final à la place du contrôle continu

Cette solution semble se dessiner dans de nombreuses universités. « De toute façon, ça s’impose puisqu’on n’a pratiquement pas eu cours de tout le 2e semestre. Donc, on n’a pas eu de note… » CQFD. Encore que. Dès le début du mouvement, certains profs ont mis leurs poly en ligne sur Internet, demandant aux élèves des rendus de travaux réguliers.

Mais cela reste au bon vouloir de l’enseignant... et des élèves, comme le souligne Clélia, étudiante en info com, à Paris VIII. « Certains de mes profs nous font des corrigés d’exercice par mail personnalisé. J’ai toujours deux-trois trucs à rendre par semaine. C’est toujours pareil : les élèves les plus motivés bossent. Le problème, c’est pour les autres. Ceux qui décrochent… »

Hypothèse 4 : examens allégés et adaptés

Nicolas Offenstadt, prof d’histoire à Paris 1, se veut optimiste et résolument rassurant. « On ne se bat pas contre les élèves, au contraire : on va tout faire pour les protéger. Quitte à modifier complètement le contenu des examens. »

Il est en discussion depuis plusieurs semaines avec ses collègues et les idées ne manquent pas : « On pourrait très bien imaginer un examen écrit allégé, avec 100 pages à lire, point barre. Et pour l’oral, pourquoi ne pas leur demander de parler d’un des nombreux cours alternatifs donnés (cours hors les murs, débats sur thème d’actu…) ? ». Original, certes, mais bien loin du programme de cours académique.

Et la valeur du diplôme dans tout ça ? « Ecoutez, si les étudiants ont assisté à un quart des activités proposées, ils ont appris autant de chose qu’en un semestre de cours classique ! On a continué à enseigner, mais sous une autre forme. » Et d’ajouter, convaincu : « D’ailleurs, ce mouvement nous a permis d’expérimenter d’autres manières d’enseigner, plus ouvertes et les étudiants apprécient. On y pensait depuis longtemps, ce mouvement nous a permis de les mettre en pratique. »