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Décision du conseil constitutionnel sur la gratuité : historique ou ambiguë ? - 11 octobre 2019

vendredi 11 octobre 2019, par Mariannick

Communiqués, revue de Presse.

Communiqué du sénateur Pierre Ouzoulias

Pour le Conseil constitutionnel, l’enseignement supérieur est une des composantes du service public de l’éducation.
Ce 11 octobre 2019, à la suite de sa saisine par des organisations syndicales et estudiantines, le Conseil constitutionnel vient de rendre une décision, qu’il qualifie d’inédite, par laquelle il considère que l’enseignement supérieur public est une des composantes du service public de l’éducation. Les Sages estiment donc qu’il doit être intégré dans le champ d’application du treizième alinéa du Préambule de la Constitution du 27 octobre 1946 qui stipule que : « La Nation garantit l’égal accès […] de l’adulte à l’instruction […] L’organisation de l’enseignement public gratuit […] à tous les degrés est un devoir de l’État ». Le Conseil constitutionnel admet toutefois une dérogation au principe de gratuité de l’enseignement en autorisant la perception de « droits d’inscription modiques […] en tenant compte, le cas échéant, des capacités financières des étudiants ».
Les conséquences de cette décision historique sont considérables pour l’organisation et le financement de l’enseignement supérieur, pour les universités, mais aussi pour les écoles d’ingénieur publiques, pour les grandes écoles et pour tous les établissements publics de l’enseignement supérieur. Conformément à la décision du Conseil d’État du 27 janvier 1988 (n° 64076), le ministère chargé de l’enseignement supérieur, comme celui de l’Éducation nationale, aura l’obligation d’assurer sa mission d’intérêt général d’enseignement en organisant notamment l’enseignement de toutes les matières obligatoires.
Non seulement, la décision d’une augmentation des droits d’inscription des étudiants étrangers perd tout fondement légal, mais elle oblige le Gouvernement à refonder toute l’économie de l’enseignement supérieur public sur le principe de la gratuité. L’importance historique de la décision du Conseil constitutionnel et ses conséquences considérables pour l’organisation de ce service public imposent au Gouvernement d’engager, sans délais, des discussions avec le Parlement et tous les représentants des organisations représentatives des étudiants, des enseignants et des établissements pour assurer la rentrée 2020, dans le nouveau cadre fixé par le Conseil constitutionnel. Avant le vote du budget, la convocation d’un « Grenelle » de l’enseignement supérieur est d’une absolue nécessité.

À Paris le 11 octobre 2019


Communiqué de la CPU

Qui cépéhute comme jamais, qui tremble et qui enmêmetemps.

Le Conseil constitutionnel soulève donc une question de fond qui peut conduire à des bouleversements de grande ampleur dans les équilibres des financements de l’enseignement supérieur public.


Le Conseil constitutionnel entérine la gratuité de l’enseignement supérieur

11 octobre 2019, Faïza Zerouala Médiapart

Dans une décision rendue publique le 11 octobre, les sages contrecarrent l’arrêté ministériel qui met en place des frais d’inscription différenciés pour les étudiants étrangers extracommunautaires.

Me Florent Verdier, l’avocat des requérants, considère avoir arraché « une victoire historique » car le Conseil constitutionnel dispose ainsi que l’enseignement supérieur est un degré pour lequel la gratuité s’applique, au même titre qu’à l’école maternelle, à l’école primaire, au collège ou encore au lycée.
[…] « Si c’est gratuit, il est impossible de faire exploser le tarif des droits d’inscription », argumente-t-il.

Il reconnaît toutefois dans cette décision un point non satisfaisant. « Le Conseil constitutionnel, contra legem, contre la loi donc, considère que des droits d’inscription “modiques” peuvent être établis par arrêté ministériel.  » Pour lui, le Conseil constitutionnel « outrepasse sa fonction » ce faisant car la prérogative de fixer les droits d’inscription appartient au pouvoir législatif.[…]

Pour [Paul Cassia], la décision n’est pas aussi tranchée qu’elle le devrait : « Le principe de gratuité n’est pas un principe mais c’est un devoir de l’État de prévoir la gratuité de l’enseignement à tous les degrés. Le ministère a voulu prétendre que l’enseignement supérieur n’est pas un degré d’enseignement, or s’il s’appelle supérieur, c’est bien que c’est un degré supplémentaire au secondaire. Le Conseil constitutionnel, donc l’État, se défend simplement face à un argument faux  », explique le juriste [Paul Cassia].
Le juriste tique également sur le choix de l’adjectif « modique », considérant que «  ce terme peut être interprété différemment. Le fils ou la fille du milliardaire Bill Gates peut payer 100 000 euros de frais d’inscription. Pour lui, c’est modique. Le Conseil constitutionnel a modelé le droit à la réalité et adapté la Constitution à ce qui se fait. Alors que c’est l’inverse qu’il faudrait faire. Le droit est clair, gratuité, point barre. Cette décision ne permet pas en elle-même de résoudre la légalité de la différenciation tarifaire pour les étudiants étrangers ».

C’est maintenant au Conseil d’État d’examiner, à l’aune de cette décision du Conseil constitutionnel, la légalité de l’arrêté ministériel du 19 avril.


Le Conseil constitutionnel acte la gratuité de l’enseignement supérieur, mais admet des "droits modiques"

France-Info, (et AFP)11 octobre

Les syndicats étudiants y voient un revers important pour le gouvernement.

C’est autour du terme "modique" que la bataille va maintenant se jouer devant le Conseil d’État. Pour les plaignants, 2 700 euros pour un étudiant étranger représente une somme qui est tout sauf modique. De son côté, le ministère, joint par franceinfo, a une autre interprétation : malgré cette hausse, l’État prend toujours en charge les deux tiers du coût de la formation d’un étranger extra-européen.


Frais universitaires des étrangers. Le Conseil constitutionnel rappelle le principe de gratuité

Ouest-France, 11 octobre 2019

Dans sa décision, le Conseil constitutionnel « déduit de façon inédite » que « l’exigence constitutionnelle de gratuité s’applique à l’enseignement supérieur public ».

Pour autant, « cette exigence ne fait pas obstacle, pour ce degré d’enseignement, à ce que des droits d’inscription modiques soient perçus en tenant compte, le cas échéant, des capacités financières des étudiants ».

Reste à savoir ce que signifie le terme « modiques ».