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A l’université Paris-Saclay, de coûteuses divisions - Adrien de Tricornot, Le Monde, 21 mai 2016
vendredi 20 mai 2016, par
Où l’on apprend qu’un rapport sénatorial propose de fusionner les établissements de Paris Saclay sous une forme d’EPSCP (Établissement public à caractère scientifique, culturel et professionnel) et non d’Université ... ce qui permet, entre autre, de créer des statuts dérogatoires ...
Un rapport sénatorial préconise de sanctionner les écoles qui freinent le regroupement, notamment Polytechnique
Face aux difficultés de mise en œuvre de la grande université intégrée Paris-Saclay, le sénateur socialiste Michel Berson préconise de " sanctionner financièrement les établissements qui freinent la dynamique du projet ". Rapporteur spécial du Sénat sur le programme d’investissements visant à faire émerger une Silicon Valley franciliennne sur le plateau de Saclay, au sud de Paris, le sénateur a tapé du poing sur la table, jeudi 19 mai, en demandant de " renforcer le portage politique du projet de cluster - pôle - de Paris-Saclay afin de mettre fin aux dissensions entre ministères " qui ont pesé jusqu’ici sur la mise en œuvre du projet.
Cette université devait faire figure de Stanford français dans cet environnement innovant. Mais son avancement est décevant. Certaines écoles d’ingénieurs, notamment Polytechnique – sous tutelle du ministère de la défense –, ont été tentées de jouer leur propre partition… Le sénateur préconise donc désormais de moduler les financements de manière incitative. La Communauté d’universités et d’établissements (Comue) université Paris-Saclay réunit en effet dix-neuf universités, grandes écoles et organismes de recherche – parmi lesquels les plus prestigieux comme l’université Paris-Sud (Orsay), l’X, Centrale Supelec, HEC ou le CEA. Mais l’évaluation menée par le jury international des initiatives d’excellence (Idex), présidé par Jean-Marc Rapp, a pointé son inachèvement.
Vendredi 29 avril, l’université Paris-Saclay a donc vu la période probatoire de son Idex prolongée de dix-huit mois par le premier ministre, Manuel Valls. Le jury jugera in fine sur le " modèle détaillé " de l’université et " l’adhésion des établissements engagés à la construire ". A la clé, 25,6 millions d’euros de financements annuels. Cet enjeu financier n’a pas suffi, jusqu’ici, à convaincre les grandes écoles soucieuses de préserver leur statut et leurs modes de fonctionnement d’établissements d’élite.
En juin 2015, le rapport de Bernard Attali " L’X dans une nouvelle dimension " proposait de regrouper, à l’intérieur même de l’université Paris-Saclay, toutes les écoles d’ingénieurs autour de l’X (Centrale Supélec, Ensta, Télécom, Ensae, AgroParisech, Institut d’optique, ENS Cachan), d’autres ayant aussi vocation à les rejoindre : l’Ecole des mines et celle des Ponts.
Au conseil d’administration de Polytechnique, le 15 décembre 2015, " les ministres de la défense et de l’économie ont paru encourager la constitution de ce “pôle d’excellence” autour de l’Ecole polytechnique qui ne pouvait qu’entraîner à terme la disparition de l’université Paris-Saclay ", déplore M. Berson. Si " un arbitrage rendu au plus haut niveau est venu mettre un terme à cette regrettable cacophonie ", le sénateur propose qu’un délégué interministériel soit désormais chargé du projet – une idée déjà avancée par Bernard Attali.
Pour M. Berson, il faudrait aussi augmenter les ressources propres de l’université Paris-Saclay, y créer une fondation universitaire et augmenter sa visibilité par des actions de communication, ou la nomination d’une personnalité scientifique chargée d’en être l’ambassadeur. Il envisage aussi que l’université et le Genopole d’Evry rejoignent le projet.
Un pôle encore en chantier
Alors que l’Ecole polytechnique a annoncé fin 2015 vouloir ouvrir des diplômes de premier cycles payants (bachelors) pour les étudiants étrangers, M. Berson préconise, d’autre part, que ces formations soient portées en commun par l’université Paris-Saclay.
Pour rebâtir le projet institutionnel de l’université Paris-Saclay, le rapporteur a avancé, jeudi, la piste de l’adoption du statut de " grand établissement ", déjà retenu par l’université de Lorraine pour fédérer universités et écoles, et qui permet à chaque entité de garder des règles de fonctionnement propres. Jeudi 19 mai, l’Ecole polytechnique indiquait seulement que " les membres de l’université Paris-Saclay réfléchissent sereinement et en concertation à la meilleure manière de progresser dans le futur ".
Mais le risque d’une sortie de l’Ecole polytechnique du projet n’est pas à écarter en cas d’échec des discussions. Elle serait " la première à en pâtir " compte tenu de sa " petite taille à l’échelle internationale ", prévient le sénateur. Pour qui " les querelles de chapelle franco-françaises sont totalement dépassées " si l’on veut rivaliser avec Harvard, Stanford ou Cambridge.
Alors que l’Etat s’est engagé à investir 4,5 milliards d’euros dans le cluster de Paris-Saclay – qui concentre 13 % de la recherche et développement en France –, des efforts restent à déployer, souligne aussi le rapport, notamment en matière de transport, pour maintenir son attractivité. Le plateau de Saclay concentre des atouts considérables. Mais son pôle est encore en chantier.
Adrien de Tricornot[/rouge]