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Les universités multiplient les plans de rigueur. Le Monde du 17 juillet - Nathalie Brafman

Selon nos informations, 16 établissements sur 76 prévoient d’être déficitaires en 2013

mercredi 17 juillet 2013, par Hélène

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Début juillet, le président de l’université Versailles Saint-Quentin (UVSQ), Jean-Luc Vayssière, a reçu deux experts du ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche. L’objet de cette visite ? Sa situation financière plus que délicate. En 2012, l’établissement a perdu 5,2 millions d’euros à cause d’investissements immobiliers trop lourds et de l’augmentation de la masse salariale. " Aujourd’hui, nous sommes incapables de faire un budget équilibré, sauf à mentir... ", confie-t-il.

La situation de l’UVSQ n’est pas isolée. Selon des chiffres que Le Monde s’est procurés, 16 universités sur 76 prévoient d’être déficitaires en 2013. Elles étaient 15 un an auparavant. Plus grave, 9 établissements ont affiché un double déficit en 2011 et 2012 et trois sont en perte depuis trois ans : Paris XIII (Villetaneuse), Paris-I (Panthéon-Sorbonne) et Paris VI (UPMC- Université Pierre et Marie Curie).

Pour boucler leur budget, les universités, du moins celles qui peuvent se le permettre, puisent dans leurs réserves. Résultat, 36 d’entre elles ont fini 2012 avec un fonds de roulement inférieur au seuil prudentiel de 30 jours. Pour 2013, elles seront 50. " Nous avons 18 jours de fonctionnement ", confie Pascal Reghem, président de l’université du Havre. La trésorerie est quasiment nulle à Paris-I.

Dans un contexte budgétaire tendu, les universités sont à la diète forcée. La panoplie des économies est large : diminution des heures complémentaires confiées à des vacataires, gels de postes, mutualisation de cours en master, fermeture de certaines options... Les frais de missions et de réception sont aussi sous surveillance.

Gel de postes La masse salariale, premier poste de dépense, est touchée. Les universités les plus fragilisées ont décidé de ne pas pourvoir un certain nombre de postes pourtant inscrits dans leurs plafonds d’emplois. La totalité des 1 000 emplois créés en 2013 par le ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche et destinés au premier cycle ne devrait pas être pourvue. Les universités utilisent néanmoins l’argent de ces postes (57 200 euros chacun) pour faire face à d’autres dépenses. Paris-I a ainsi rééchelonné 23 postes sur les 50 vacants en attendant des jours meilleurs. Ce qui représente 1,5 million d’euros d’économie. Selon le Snesup, principal syndicat de l’enseignement supérieur, plus de 300 postes seraient déjà gelés.

Baisse des heures supplémentaires Avec la loi sur l’autonomie, les universités ont eu massivement recours aux contractuels pour assurer les travaux dirigés ou les cours en premier cycle de licence. " Au total, cela représente 300 millions d’euros dans les budgets des universités ", indique le ministère de l’enseignement supérieur. Les universités sont donc appelées à réduire le nombre de contractuels. Même chose pour les heures supplémentaires. Dans certaines universités, celles-ci bénéficient quasiment à tous les enseignants alors que le ministère a fixé la norme à 20 % du corps enseignant d’un établissement. L’inspection générale de l’administration de l’éducation nationale avait même dénoncé il y a quelques années le fait que des universitaires pouvaient dispenser des cours au titre des heures complémentaires alors que leur service de base n’était pas effectué.

Mutualisation de cours et fermeture d’options Pour préserver leurs offres de formations, les universités n’ont souvent pas d’autres choix que de supprimer certaines options ou de mutualiser des cours de masters. L’université de Bourgogne a ainsi gagné une trentaine d’heures de cours en deuxième année de master d’informatique. Et une option sur trois a été supprimée. A Paris-I, certaines options ne devraient pas être reconduites comme celle du droit allemand des affaires. Des cours magistraux en droit et en économie-gestion devraient passer de 39 heures à 36 heures. Au Havre, en master de lettres, de géographie ou encore de sociologie, il a été décidé de mutualiser les cours à hauteur d’au moins 40 %.

Augmenter le nombre d’étudiants en travaux dirigés Alors que les étudiants sont censés bénéficier d’un encadrement resserré en TD, certaines universités ont décidé d’augmenter le volume des groupes. " En psychologie, les étudiants sont 50 alors qu’ils devraient être 30 ", indique par exemple Jean-Paul Saint-André, président de l’université d’Angers.

Réduire l’offre de formations C’est une hypothèse que souffle parfois le ministère de l’enseignement supérieur. A l’université Versailles-Saint-Quentin, où l’objectif est d’atteindre l’équilibre en 2016, un master professionnel en chimie a été supprimé. " Nous faisons face à un déficit d’étudiants en sciences. Or, en maths et en physique, nous avons des masters de 900 heures pour 10 étudiants, souligne Jean-Luc Vayssière, son président. Aujourd’hui, c’est simple. Si un enseignant veut maintenir coûte que coûte son master, je lui demande comment le financer. "

A Angers, l’ouverture prévue en 2012 d’une dizaine de formations, notamment en psychologie et en droit des affaires, a été repoussée. Paris-I préfère réduire l’offre qu’elle propose afin de pouvoir recruter. " Certains de nos masters proposent une quinzaine d’options avec quatre étudiants... ", justifie l’université.

Pas facile de faire passer la pilule pour les présidents. A l’annonce d’un plan d’économie de 5 millions d’euros à Paris XIII, personnels administratifs, enseignants et syndicats ont menacé de ne pas faire la rentrée.

A Paris-I, le conseil d’administration du 9 juillet, qui devait entériner les mesures d’économies, a été envahi par les étudiants de l’Unef. Un autre est prévu mercredi 17 juillet.

Nathalie Brafman