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Communiqué de SLU ! 24 juin 2013

mardi 25 juin 2013, par PCS (Puissante Cellule Site !)

« On est très loin du grand soir »
(Sénatrice Corinne Bouchoux, du groupe EELV)

Dans la nuit du 21 au 22 juin, le Sénat a adopté le projet de loi sur l’Enseignement supérieur et la Recherche, par 172 voix pour et 157 contre. Le groupe Verts a voté pour, et ses voix ont fait la différence : sans elles, le texte était rejeté.

Disons-le d’emblée : les débats du Sénat, pas plus que ceux de l’Assemblée nationale, n’ont permis de revenir sur les questions fondamentales que pose cette loi : transfert et alignement immédiat et complet des connaissances sur les exigences du monde socio-économique, recul de la démocratie dans les organes délibérants des universités, introduction de la continuité entre le lycée et les premiers cycles universitaires conduisant mécaniquement à la secondarisation de l’université, création de communautés d’universités destinées à être les instruments de la régionalisation de l’ESR et de nouveaux leviers contre ce qui demeurerait des traces de la démocratie universitaires, explosion de la précarité…

Les débats du Sénat ont même abouti à des « innovations » que ne prévoyait pas le texte initial : les sénateurs et sénatrices ont ainsi adopté un amendement visant à supprimer la procédure de qualification aux fonctions de maître de conférences et de professeur. Or supprimer la procédure de qualification sans la moindre réflexion ni concertation, c’est le retour assuré des baronnies et des thèses de complaisance.

Cet amendement a été présenté par les Verts, qui avaient expliqué, dans les jours précédents, qu’ils ne voteraient pas la loi sans des modifications significatives.

Au bout du compte, n’ont finalement voté contre l’ensemble de la loi que le Front de Gauche et l’UMP – pour des raisons radicalement opposées. Et les Verts de se réjouir d’un travail d’amendement et de « co-construction », ce qui laisse pantois.

Que signifie « co-construire » une loi quand, à aucun moment, les « consultations » (les Assises régionales et nationales de l’ESR, etc.), longues mais partielles (rappelons que les Collectifs de précaires n’ont jamais été inclus dans le processus des Assises), n’ont permis d’intégrer la moindre critique ni d’apporter le moindre infléchissement à un projet de loi bricolé ?

Que signifie parler de « co-construction » alors que ce projet de loi est passé en procédure accélérée ? Et que dire des débats, où les voix dissonantes ont été noyées par le brouhaha mondain autour de la question des cours en anglais, et où l’une des dernières interventions de la ministre a consisté à rassurer la haute-assemblée sur le sort du président de l’AERES, D. Houssin.

Lorsqu’on saura que ces débats ont eu lieu au sein d’une assemblée plus que clairsemée (de 15 à 30 sénateurs et sénatrices seulement étaient présents), on ne peut que s’interroger : une loi qui enterre l’ESR, discutée par 30 personnes ? L’éducation, la formation, la recherche sont-elles à ce point négligeables qu’elles ne vaillent même pas un véritable débat d’ampleur au Parlement ?

En pleine explosion des problèmes budgétaires des universités passées à « l’autonomie », réduction drastique des formations, systématisation du choix des emplois précaires « pour faire tourner la machine », en même temps qu’éviction des précaires trop « anciens » pour ne pas avoir à les titulariser, cette loi accentue la subordination de l’Université et de la Recherche aux « exigences du marché », se lave les mains du sort des jeunes docteurs sans emploi, berne les étudiants, les parents, les employeurs, en leur faisant croire à une formation universitaire de qualité : l’objectif affiché de« 50% d’une classe d’âge détentrice d’une licence » – seule « vision » de ce projet de loi – peut-il passer pour un progrès démocratique quand on invalide par ailleurs l’idée même de formation disciplinaire dans ces licences ? quand on continue de détruire le cadre national des diplômes, en livrant les étudiants, plus encore qu’ils ne le sont actuellement, à la seule « vision » des régions ?

La Commission mixte paritaire députés-sénateurs va se réunir le 26 juin ; elle comprend 7 députés (4 de gauche, 3 d’opposition) et 7 sénateurs (3 socialistes, 1 Vert, 2 UMP, 1 UDI). Le texte, pour être adopté, devra recueillir 8 voix favorables.

Voter ce texte en l’état, ce pourrait bien être quelque chose comme le grand soir de l’ESR.

Sauvons l’Université !
24 juin 2013