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"Ce que l’autonomie va changer pour l’université de Troyes"

"Le Monde" du 25 juillet 2008

vendredi 25 juillet 2008, par Laurence

La ministre de l’enseignement supérieur, Valérie Pécresse, a présenté, jeudi 24 juillet, le bilan de la première année d’application de la loi relative aux libertés et responsabilités des universités (LRU), votée le 11 août 2007. A cette occasion, Mme Pécresse a présenté la liste des vingt premières universités qui accéderont à l’autonomie au 1er janvier 2009. L’université de technologie de Troyes figure parmi ces universités pilotes, que devraient rejoindre les 65 autres universités françaises dans un délai de cinq ans. Christian Lerminiaux, son président, explique ce que va lui apporter l’autonomie.

Cette première vague d’autonomie est fondée sur le volontariat. Pourquoi avoir été candidat à l’expérience ?

Christian Lerminiaux : Cela fait quatre ans que je suis à la tête de l’université de technologie de Troyes, et je considère que pour être compétitive au niveau international, elle n’a pas d’autre choix. Il est nécessaire d’avoir en sa possession les mêmes outils que les autres établissements, et cela implique notamment un certain degré d’autonomie. L’objectif est simple : avoir une capacité de gestion plus forte qu’à l’heure actuelle, dans la façon de trouver des ressources et de les employer.

A quoi va servir l’autonomie ?

Il y a pour moi deux aspects fondamentaux : la gestion des ressources humaines et celle du budget. Il me paraît fondamental que les enseignants-chercheurs se sentent concernés par l’organisation dans laquelle ils évoluent : ce qui s’y passe, sa stratégie, son avenir. Or, à l’heure actuelle, la gestion des carrières d’enseignants-chercheurs se faisant au niveau national, l’université n’assure finalement qu’un rôle de gîte. Avec l’autonomie, cette gestion sera prise en charge directement au niveau de l’université. Cela permettra de stimuler ses personnels, qui s’identifieront plus fortement à leur institution.

L’autre aspect très important de cette réforme est évidemment budgétaire. Etre à même de maîtriser ses ressources, cela implique de mettre en place une comptabilité analytique, une gestion par projets. Et cela permet d’avoir une vision d’ensemble pour son établissement.


Comment va être mené le passage à l’autonomie ?

L’Etat va nous accompagner dans ce processus, en nous donnant un peu d’argent [une dotation de 250 000 euros par université autonome est prévue], mais surtout en nous permettant de former nos personnels [un plan de formation triennal sera mis en place pour les personnels d’encadrement]. Cette formation est capitale. En effet, le fait que la gestion des ressources humaines passe au niveau universitaire change complètement la donne. On passe d’une logique relativement individualiste à une logique beaucoup plus organisationnelle. Il va donc falloir, dans les quatre à cinq mois à venir, assurer cette gestion de la masse salariale des fonctionnaires, en travaillant de près avec le ministère de l’enseignement supérieur.

Le gros du travail sera aussi de préparer le budget 2009 de notre université. Il va passer de 15 à 32 millions d’euros. En moyenne, toutes les universités concernées par l’autonomie vont voir leur budget multiplié par 2,5.


Y a-t-il un risque à figurer parmi ces universités pilotes ?

Il y a un risque, d’ailleurs discuté entre le ministère de l’enseignement supérieur et celui des finances : il concerne le nombre d’emplois. L’Etat veut limiter le nombre d’emplois publics, alors qu’on permet aux universités de diversifier leurs ressources. Il ne faudrait pas qu’au final, si on a trouvé les ressources nécessaires, on soit empêché de créer le nombre d’emplois désiré.

Par ailleurs, il y a un risque financier. Les universités devront avoir une gestion comptable plus fine, car il est hors de question de se retrouver sans argent à la fin du mois de septembre. Mais si les bons outils comptables sont mis en place, il n’y a pas de raison que cette transition se passe mal. A l’université de technologie de Troyes, on gère déjà une masse financière qui représente 40 % de la masse salariale, passer à 100 % ne devrait pas être un souci.

Quels sont aujourd’hui vos projets ?

Nous en avons plusieurs, notamment en ce qui concerne l’ouverture à l’international. On réfléchit actuellement à la mise en place, avec nos partenaires de Belfort et de Compiègne, d’une université de technologie à Shanghaï. Un autre projet au Pakistan est en réflexion. Nous avons également mis en place un groupement d’intérêt scientifique sur le thème de la surveillance, de la sûreté et de la sécurité des systèmes. L’autonomie, notamment financière, est une aubaine pour l’exécution de tels projets.

Propos recueillis par Chine Labbé