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Eva Joly "Remettre l’école au centre du combat pour l’égalité" - Café Pédagogique, 20 janvier 2012

vendredi 20 janvier 2012, par Mariannick

Pour la candidate d’Europe Écologie Les Verts, il est urgent de lutter contre le stress à l’École. Pas seulement pour améliorer la qualité relationnelle dans l’École mais aussi parce que c’est une étape vers plus d’égalité. Eva Joly souhaite créer 20 000 nouveaux postes d’enseignants dans les quartiers défavorisés. Elle veut lancer des "États Généraux de l’Éducation" pour refonder l’École. Mais sa signature se retrouve particulièrement dans l’idée d’assouplir le rapport à l’école. "De 16 à 25 ans, je veux que chacun puisse facilement interrompre ou reprendre son parcours. Les jeunes français sont parmi les plus stressés du monde : ce stress est lié à l’absence de droit à l’erreur. Je veux donner le droit à l’erreur, le droit de rater, le droit de recommencer. Je veux donner le droit de partir, de travailler, de vivre une expérience personnelle grâce à l’éducation populaire, et de revenir".

Quelle doit être la priorité de toute action politique sur l’éducation pour vous ?

Eva Joly
Ma plus grande crainte pour l’école, c’est qu’elle devienne le lieu de la compétition acharnée. Que sous couvert d’excellence, ce soit le règne de la concurrence. Je ne veux pas d’un tel système qui gaspille les talents en condamnant dès le plus jeune âge des enfants. Et, comme par hasard, ceux qui sont condamnés sont bien souvent ceux qui sont nés au mauvais endroit, dans le mauvais quartier. Avec la lutte de tous contre chacun, l’égalité n’a pas plus sa place, ni comme postulat, ni comme horizon. Cela nous condamne à la reproduction sans fin de la domination.

Plutôt que de fragmenter, je veux remettre l’école au centre du combat pour l’égalité, en réunissant dès le début du quinquennat, des États Généraux de l’Éducation, avec toujours la même obsession : l’égalité. Nous mettrons sur la table la question de la carte scolaire, de la répartition des moyens sur le territoire, de l’affectation des jeunes enseignants. Plutôt que défaire le collège unique, je défends l’idée d’une école fondamentale accueillant toute une classe d’âge jusqu’à 16 ans sans sélection ni orientation. De 16 à 25 ans, je veux que chacun puisse facilement interrompre ou reprendre son parcours. Les jeunes français sont parmi les plus stressés du monde : ce stress est lié à l’absence de droit à l’erreur. Je veux donner le droit à l’erreur, le droit de rater, le droit de recommencer. Je veux donner le droit de partir, de travailler, de vivre une expérience personnelle grâce à l’éducation populaire, et de revenir.

A droite l’UMP met en avant un modèle sur l’École : celui du pilotage par l’évaluation et de la mise en concurrence des écoles et établissements. C’est un modèle qui est déjà opérationnel dans plusieurs pays ce qui lui ajoute du poids. Pensez-vous que la France puisse échapper à ce modèle de gestion de l’École ? Si oui, par quoi le remplacerez-vous ?

La mise en concurrence existe et s’étend, mais le pilotage est à courte vue. Les citoyens doivent se réapproprier la réflexion sur les critères et les confusions savamment entretenus sur l’évaluation doivent être levées. Par quoi le remplacer ? Par une logique de coopération, de complémentarité, entre les établissements. Cela implique une réelle transparence (par exemple les budgets consolidés des établissements). La coopération doit se construire à l’échelle des bassins de vie, sur une logique de projet. Les démarches démocratiques doivent être aussi encouragées qui associent les élèves, les parents et permettent de coopérer avec les acteurs d’un territoire, dont les dimensions s’étendent progressivement au fur et à mesure de la scolarité.

Dans les idées qu’on entend un peu partout (pas seulement chez Sarkozy), il y a l’idée qu’on peut augmenter le temps de travail des enseignants. Même si, de fait, les rectorats n’arrivent plus à caser leurs heures supplémentaires défiscalisées. Quel est votre sentiment là-dessus ?

Je suis opposée à cette logique si elle aboutit à augmenter les temps d’enseignement en classe entière. Car cela rend très difficile l’individualisation de l’enseignement, car cela ne permet pas de varier les groupements d’élèves en fonction des besoins, des rythmes ou des projets. Il faut au contraire que les enseignants puissent avoir moins d’élèves à suivre en même temps, et pour cela repenser le temps de travail des enseignants, des élèves… et aussi ce qu’on demande aux parents ! Les élèves sont de plus en plus tôt soumis à un stress permanent, leurs parents aussi. Et par ricochet, les enseignants... Il est temps d’afficher « RALENTIR ÉCOLE », pour s’approprier le savoir à son rythme. Pour apprendre à vivre en groupe, à prendre des responsabilités. Pour confronter ses émotions, ses impressions. Pour rencontrer l’autre. Pour comprendre ce que les adultes demandent.

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