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Lettre ouverte de 63 MCU en science politique sur la composition de l’instance nationale d’attribution de la PES (20 septembre 2011)

mardi 20 septembre 2011, par Laurence

Monsieur le Ministre,

Nous nous permettons d’attirer votre attention sur la composition de l’instance nationale procédant à l’attribution de la prime d’excellence scientifique. Non seulement ce dispositif de prime n’est pas de bonne gestion dans notre profession (le même budget affecté à une revalorisation de tous les salaires et/ou à des promotions supplémentaires serait plus efficace), mais il comporte en outre un aspect particulièrement choquant : l’instance en question ne comporte pas de Maître de Conférences des Universités alors même que le Décret n°2009-851 du 8 juillet 2009 relatif à cette prime ainsi que l’arrêté du 18 septembre 2009 fixant les modalités de fonctionnement de l’instance nationale, prévoient que la dite instance est composée de Professeurs des Universités (PU) et de Maîtres de Conférences des Universités (MCU).

Nous nous réjouissons que la récente décision n°2001/PES/1 du 16 mai 2011 de la Direction Générale pour l’Enseignement Supérieur et l’Insertion Professionnelle innove en intégrant enfin, au sein de cette instance, une représentation des chercheurs du CNRS qui participent à l’unité de la communauté scientifique, quand bien même relèvent-ils d’autres corps de fonctionnaires avec des conditions de travail différentes. Mais nous en tirons aussi une remarque importante : il n’est ni raisonnable aujourd’hui au regard de ce qu’est la science, ni rationnel du point de vue de la gestion des ressources humaines dans l’enseignement supérieur de refuser de nommer des Maîtres de Conférences et d’exclure ainsi une si large partie de la communauté scientifique de l’instance d’attribution de la prime d’excellence scientifique. Or nous constatons, en ce qui concerne notre discipline (science politique - section n°4 du CNU) mais aussi de beaucoup d’autres disciplines, qu’à trois reprises depuis deux ans (depuis la Décision n°2009/PES/1 du 18 septembre 2009), la Direction Générale pour l’Enseignement Supérieur et l’Insertion Professionnelle de votre ministère reproduit cette exclusion.

En raison de l’intitulé nouveau que le gouvernement a donné à cette prime en 2009, une telle exclusion, si elle venait à perdurer, pourrait laisser entendre que les Maîtres de Conférences des Universités (MCU) seraient moins aptes que les Professeurs des Universités (PU) à juger de l’excellence scientifique de leurs collègues. Or l’excellence scientifique s’atteste dans des travaux de recherche et des publications dont la validité scientifique n’a jamais dépendu, aux yeux des scientifiques, d’un grade professionnel mais uniquement de leurs résultats et contenus. C’est la reconnaissance, l’acceptation et la valorisation de ces résultats de recherche et contenus des publications par l’ensemble des scientifiques d’un domaine qui en définit la valeur. De ce point de vue là, les travaux et par conséquent les compétences scientifiques des Maîtres de Conférences des Universités (MCU) et des Professeurs des Universités (PU) sont strictement équivalents.

Par ailleurs, nous vous rappelons que les deux catégories d’enseignants-chercheurs appartiennent à la même catégorie de fonctionnaires, de rang A, que leurs qualifications initiales par le Doctorat sont identiques et que leurs activités scientifiques, tout au long de la carrière le sont également : leurs publications scientifiques dans les revues, ouvrages collectifs et collections de livres sont soumises aux mêmes conditions d’évaluation par les responsables éditoriaux. Par ailleurs leurs charges professionnelles sont les mêmes tant dans l’enseignement, par cours magistraux ou travaux dirigés, que dans l’administration des universités, départements, laboratoires, diplômes, etc. Et pour l’encadrement doctoral, l’Habilitation à Diriger des Recherches rétablit cette égalité fonctionnelle. La séparation des intitulés et corps d’enseignants-chercheurs est un archaïsme dont l’histoire est ancienne mais qui ne s’accompagne plus aujourd’hui des croyances d’origine : nous savons qu’elle perdure jusqu’à nos jours principalement pour maintenir à un niveau plus bas les salaires de la plupart des enseignants-chercheurs.

Sur le plan du fonctionnement universitaire, nous constatons en outre un écart croissant entre la France et les autres pays, que ce soit en Europe ou dans le reste du monde : les systèmes universitaires modernes ne dissocient plus dans la délibération administrative ou professionnelle relative aux qualités scientifiques les catégories de chercheurs ou d’enseignants-chercheurs dès lors que leur qualification initiale par le Doctorat (PhD) et une première procédure de recrutement est acquise. Cela est rationnel au regard de ce qu’est devenue la science : dès lors qu’il s’agit d’évaluer les compétences des personnes sur la base de leurs résultats scientifiques - la science ne pouvant pas se diviser en deux sciences différentes - non seulement les critères mais aussi les conditions sociologiques de jugement doivent être les mêmes pour tous, ce qui signifie que le collège d’évaluation aussi doit être le même pour tous. De ce fait, les décisions d’attribution de la prime d’excellence scientifique ne peuvent pas exclure les deux tiers d’une communauté scientifique sans devenir étranges.

Nous souhaitons vous rencontrer à ce sujet pour approfondir avec vous ou vos représentants les différents aspects de ce dossier. Pourriez-vous nous accorder une audience à ce sujet ?

En espérant une réponse favorable de votre part, nous vous prions d’agréer, Monsieur le Ministre, l’expression de notre très haute considération.

63 Maîtres de Conférences des Universités en science politique (CNU section n°4) :

Gilbert Achcar (U. Paris 8) - Dominique Andolfatto (U. Nancy) - Myriam Bachir (U. Amiens) - Anne Bazin (IEP Lille) - Didier Bigo (IEP Paris) - Nathalie Blanc-Noël (U. Bordeau IV) - Laurent Bonnelli (U. Paris 10) - Taoufik Bourgou (U. Lyon 3) - Goulven Boudic (U. Nantes) - Gwendal Chaton (U. Angers) - Thierry Choffat (U. Nancy) - Philippe Corcuff (IEP Lyon) - Stéphane Corcuff (IEP Lyon) - Sophie Daviaud (IEP Aix en Provence) - Christine Cadot (U. Paris 8) - James Cohen (U. Paris 8) - Alain Darre (U. Rennes 1) - Mohammad Said Darviche (U. Montepellier) - Damien De Blic (U. Paris 8) - Damien Deschamps (U. La Réunion) - Jérôme Desert (U. Perpignan) - Guilhem Dezeuze (U. Montpellier 3) - Mohamed Djouldem (U. Montpellier 3) - Philippe Droz-Vincent (IEP Toulouse) - Speranta Dumitru (U. Paris 5) - Hasan Elmas (U. Paris 8) - Renee Fregosi (U. Paris 3) - Thomas Frinault (U. Rennes) - Mahfoud Galloul (IEP Lyon) - Frédéric Gonthier (IEP Grenoble) - Fabienne Greffet (U. Nancy 2) - Elsa Guillalot (U. Grenoble 2) - Magdalena Hadjiisky (IEP Strasbourg) - François Hourmant (U. Angers) - Jean Jacob (U. Perpignan) - Laurence Jourdain (U. Amiens) - Cécile Leconte (IEP Lille) - Olivier Le Cour Grandmaison (U. Evry) - Christophe Le Digol (U. Paris 10) - Henri Maler (U. Paris 8) - Dominique Maliesky (IEP Rennes) - Anne Mandeville (U. Toulouse) - Dominique Mansanti ( IEP Grenoble) Nathalie Martin-Papineau (U. Poitiers) - Philippe Marchesin (U. Paris 1) - Régis Matuszewicz (U. Reims) - Laura Michel (U. Montpellier 1) - Pascal Nicolas-le-Strat (U. Montpellier 3) - Fouad Nohra (U. Paris 5) - Yves Palau (U. Paris 12) - Jean-François Polo (IEP Rennes) - Raphael Porteilla (U. Dijon - Sntrs) - Genevieve Prosche (U. Grenoble 3) - Sainte-Croix Rauzduel (MCF04, U. Antilles-Guyanne) - Christian Salanson (U. Paris 1) - Silvia Serrano (U. Clermont 1) - Arnault Skornicki (U. Paris 10) - Philippe Teillet (IEP Grenoble) - Michel Vakaloulis (U. Paris 8) - Jérôme Valluy (U. Paris 1) - Bruno Villalba (IEP Lille) - Chloé Anne Vlassopoulou (U. Amien) - Clemens Zobel (U. Paris 8).