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« Face aux fossoyeurs de l’éducation, nous n’avons pas d’autre choix que de résister » - Interview d’Alain Refalo par Jean-Manuel Escarnot, Libération, 1er décembre 2010

mercredi 1er décembre 2010, par Elie

Interview - L’inspecteur d’académie de Toulouse maintient la sanction disciplinaire à l’encontre du prof désobéisseur Alain Refalo, contre l’avis du Conseil supérieur de la Fonction publique de l’Etat.

Pour lire cet article sur le site de Libération.

Malgré les recommandations du Conseil supérieur de la fonction publique de l’Etat (CSFPE), l’inspecteur d’Académie de Toulouse a décidé de maintenir l’abaissement d’échelon pris à l’encontre d’Alain Refalo, le professeur-désobéisseur aux réformes gouvernementales.

Pour mémoire, outre le fait d’avoir transformé les deux heures d’enseignement personnalisé aux élèves en difficulté en atelier de théâtre pour l’ensemble de sa classe, il était reproché à l’instituteur de Colomiers de l’avoir assumé dans un courrier rendu public.

Suite à l’audition d’Alain Refalo le 14 octobre à Paris, le CSFPE avait jugé « disproportionnée » la sanction disciplinaire prise par l’inspecteur d’Académie. La dite commission de recours proposait de la remplacer par un simple blâme.

Le Réseau des enseignants désobéisseurs dénonce « une nouvelle injustice décidée au plus haut niveau par Luc Chatel, le Ministre de l’Education nationale. Une provocation contre tous les enseignants et les citoyens qui luttent pour défendre l’école publique ». Entretien avec Alain Refalo.

Comment réagissez-vous à la décision de l’inspecteur d’académie de maintenir la sanction disciplinaire prise contre vous, pourtant jugée disproportionnée par la Commission de recours de la Fonction Publique ?

Je n’ai pas été surpris. Cela fait un mois que l’inspection académique tergiverse. C’est finalement le ministre qui a pris la décision, comme le révèle la lettre que j’ai reçue. Le ministère et l’inspection académique restent dans une logique répressive, méprisant même les instances de droit qui permettent de protéger les fonctionnaires contre les abus de l’administration. Ce qui est consternant, ce sont les arguments invoqués par l’inspecteur d’académie pour justifier le maintien de la sanction. Dans sa lettre, il s’appuie seulement sur l’avis préliminaire du rapporteur, avant mon audition, et occulte totalement les raisons qui ont amené le CSFPE à recommander, à l’unanimité des membres présents, l’abaissement de la sanction. Il avait la possibilité de dénouer les nœuds du conflit en s’appuyant sur cette recommandation du CSFPE. Par sa décision, il relance l’affrontement. C’est sa responsabilité.

Quelle est la position du ministère de l’Education vis-à-vis des enseignants désobéisseurs ?

Cette action collective de désobéissance pédagogique les inquiète au plus haut point. Ils savent qu’elle est soutenue par les parents d’élèves et de nombreux citoyens qui ont compris que c’est une démarche profondément éthique et responsable qui ne pénalise aucunement les élèves, bien au contraire. Face aux fossoyeurs de l’Education nationale, nous n’avons pas d’autre choix que de résister ouvertement. C’est ce défi de la désobéissance transparente qui est insupportable au pouvoir politique. C’est pourquoi nous allons poursuivre et amplifier ce mouvement. Malgré la répression.

Comment voyez-vous l’avenir ?

Le mouvement est maintenant bien organisé et implanté dans le paysage. Dès le mois de janvier, nous relançons notre campagne de « Lettre ouverte de résistance des enseignants du primaire et du secondaire » dans le cadre de la campagne « Le service public d’éducation est un droit, pas un privilège ! » Nous commençons à avoir des contacts très intéressants avec les enseignants des collèges et des lycées. Samedi prochain, à Paris, nos organisons un grand forum des résistances dans les services publics qui permettra de mutualiser les expériences et d’organiser une convergence des résistances dans les services publics plus que jamais menacés. Stéphane Hessel sera présent. Il soutient depuis le début notre résistance avec un petit "r", car nous n’avons d’autre prétention que d’agir en conscience pour ne pas nous renier et ne pas trahir les missions du service public hérité des combats de la Résistance.