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Rapport sur la précarité dans l’Enseignement supérieur et la Recherche (8 février 2010) et CR de sa présentation au MESR le 16 février 2010

jeudi 18 février 2010, par Laurence

Ce lundi après-midi a lieu au CNRS (voir calendrier pour le programme) la présentation du rapport "précarité dans l’ESRP", présentation qui inclut une conférence de presse. Vous trouverez dans ce fichier ce rapport, ainsi que des éléments de présentation et d’explicitation du cadre de l’enquête.

Le choix des extraits et des soulignements de cette présentation sont le fait de SLU (qui est signataire de cette enquête et de ce rapport).

Le rapport se trouve aussi ici

- Un compte-rendu de ce rapport figure sur le site du SNCS
- Un résumé dans les "Dépêches de l’Education" du 8 février
- Un bref papier dans le Monde du 8
- Un plus circonstancié dans celui du 11
- Un entretien avec Robert Castel, directeur d’études à l’EHESS, sur la précarité comme état permanent (novembre 2009)
- un papier sur le blog de S. Huet (17 février 2010)

Voir aussi les interviews vidéo des auteurs du rapport

Débat audio du colloque

Pour écouter le débat

Compte rendu de la rencontre de la délégation de l’Intersyndicale au ministère (16 février 2010)

Charles-Antoine ARnaud (un des rédacteurs du rapport) prend la parole et remet le rapport (au dir-cab de Pecresse + deux secrétaires). Il présente le travail, rappelle l’existence d’un préliminaire de sociologie sur le contenu du questionnaire. Les traits saillants de l’enquête : volume et rapidité des réponses (1000 réponses en 36 h et 4409 réponses en tout + celles qui arrivent encore). Une population souffre de son « invisibilité ». A la fin du questionnaire, il y avait possibilité de s’exprimer de façon libre : beaucoup l’ont fait de façon forte.

Polémique sur le chiffrage : problème de la prise en compte ou non des effectifs. Ont pu répondre des gens dont la situation ne peut pas être prise en compte par le ministère (situations illégales, arrangements avec la loi).
Rapport divisé en quatre grands groupes : doctorants, docteurs, Biatos et Ita, EC.

Patrick Montfort (secrétaire générale du SNCS) : lit la déclaration finale de l’IS (voir ci-dessous) qui résume l’analyse. Nous souhaitons une réponse du ministère dans le mois. Comment le gouvernement va-t-il répondre à cette situation. Nous viendrons chercher la réponse.

Réponse (Carole M, puis le dir-cab) : reconnaissent que le travail qui a été fait est sérieux, exhaustif. Haut niveau de robustesse dans ce rapport. Ce n’était pas le cas de l’enquête 2007. Une réalité statistique approchée.
Il sont travaillé sur l’emploi public / l’emploi privé, etc. IL faut approcher ces questions globales.

Puis annonce d’une réponse en plusieurs temps au niveau de l’enquête. Il s’agit de travailler sur des données de gestion prévisionnelle à partir d’un recensement des flux, par discipline, par catégorie. Base de la gestion prévisionnelle. Finir le travail dans le mois de mars, et donner le résultat du travail avec les organismes et les universités en avril. Croiser ces résultats avec la stratégie nationale de recherche et d’innovation. Ensuite se posera la question des leviers.

Il faut par ailleurs solliciter le Haut Conseil pour la Science et la Technologie (remanié installé début janvier), « gardien du temple » de la stratégie nationale de recherche et d’innovation. Son avis peut éclairer dans les décisions de recrutement.

Quelques faits pour minorer le résultat : il y a une part importante d’EC dans cette enquête. le nouveau contrat doctoral a augmenté le nb d’emplois précaires. Par ailleurs, certains emplois non-titulaires sont liés au mode de financement de la recherche (Europe, etc.) : il est donc normal qu’un organisme aille chercher des chercheurs pour la courte durée. Nous n’y voyons pas de source d’inquiétude, c’est lié au nouveau mode de fonctionnement d’organiser la recherche. Ce qui est important est que les jeunes chercheurs s’insèrent dans l’emploi permanent. Les enquêtes montrent que le taux de recrutement des jeunes chercheurs est très bon : on a demandé à l’ANR de généraliser ces études pour assurer le devenir de « ses » jeunes chercheurs. On a essayé de maintenir l’emploi scientifique pour intégrer les jeunes chercheurs.

Dans les outils que nous avons, il y a aussi les CDI : un outil de plus. On ne souhaite pas généraliser les CDI dans les EPST. On a vu ce qui s’est passé dans les universités : les CDI peuvent être utiles sur des profils particuliers.

Et bref, le budget de l’état est fixé jusqu’à 2011. On discute à partir de l’été prochain du prochain budget : on verra ce qu’on peut intégrer concernant la précarité. L’année 2011 reste favorable, puisque les promesses de Fillon.

Ces analyses ont donné lieu à différentes réactions des membres de l’IS : sur l’ANR, sur les chiffres, sur l’image de a recherche donnée par le gouvernement, sur le rapport entre précarité et structuration (ou déstructuration de la recherche).

***

Déclaration finale à la presse le 8 février 2010

L’extension massive de la précarité dans la recherche et l’enseignement supérieur, la multiplication des contrats « atypiques », les pratiques de licenciement avant l’obligation de passage en CDI et la dégradation des conditions d’emploi des CDD nécessitent une riposte de grande ampleur de la part des personnels dans leur ensemble, qu’ils soient titulaires ou précaires.

Les organisations syndicales et associatives de l’enseignement supérieur et de la recherche appellent l’ensemble des personnels à prendre connaissance des résultats de l’enquête précarité et à se réunir dans les labos, UFR et services afin de multiplier les démarches pour faire connaître cette situation scandaleuse. Tous ensemble, nous nous engageons à construire des actions collectives pour que le printemps 2010 fasse sortir les précaires de l’invisibilité et soit celui de la lutte pour un emploi stable.

Depuis de trop longues années, les universités et les centres de recherche fonctionnent avec des emplois précaires. Mais, l’augmentation des financements des projets de recherche par appels d’offre, en particuliers de l’ANR, la contractualisation des universités et les décisions politiques qui suppriment les emplois de titulaires et accélèrent la déréglementation ont conduit à l’extension inadmissible de la précarité. Nous exigeons la création de postes statutaires avec la titularisation sur place des précaires de longue durée, qu’ils travaillent dans les universités ou les établissements de recherche. Le gouvernement doit arrêter les fausses promesses et engager des négociations.

La situation réelle des personnels précaires doit être immédiatement améliorée. Les contractuels des établissements publics ne peuvent plus vivre avec si peu de droits. Il est temps de mettre fin aux petits contrats qui se succèdent, à l’absence de reconnaissance de la qualification et de l’expérience acquise, aux salaires bloqués, aux droits sociaux non appliqués. Nous appelons toutes les forces syndicales et associatives dans chaque établissement, chaque région, et l’ensemble des titulaires à examiner chaque situation concrète des précaires. Nous les appelons à exiger auprès des administrations locales et nationales l’arrêt des abus et la mise en œuvre des dispositions collectives les plus favorables.

Aider les précaires à sortir de l’invisibilité est de la responsabilité de tous, sans la solidarité active des titulaires leur lutte sera plus difficile. Nous appelons tous nos collègues titulaires à mettre fin aux pratiques discriminatoires qui perdurent dans trop de lieux de travail. C’est aussi en modifiant nos comportements que nous mettrons un coup d’arrêt à toutes les mesures de dévalorisation qui frappent nos collègues précaires. C’est en améliorant leurs conditions de travail et en les défendant devant les directions, que nous améliorerons es conditions de travail de tous.

Ensemble, nous imposerons des démarches collectives pour combattre les politiques d’individualisation et de mise en concurrence des salariés, pour obtenir un plan pluri-annuel de création d’emplois statutaires, pour en finir avec la précarité.

Paris le 8 février 2010

SNTRS-CGT, FERC-SUP CGT, CGT-INRA, CGT-IFREMER
SNCS-FSU, SNESUP-FSU, SNASUB-FSU, SNEP-FSU, SNETAP-FSU
SGEN-CFDT Recherche EPST
SUP’RECHERCHE-UNSA, SNPTES-UNSA
CFTC-Recherche
SUD Education, SUD Recherche EPST, SUD Etudiant
UNEF
SLR
SLU

***

Présentation du rapport

"Le 20 octobre 2009, l’intersyndicale de l’enseignement supérieur et de la recherche a lancé une
grande enquête en ligne sur l’emploi précaire dans l’enseignement supérieur et la recherche
publique (ESRP) en France. Elle concernait les personnels précaires des universités et des
établissements de recherche (huit EPST : CNRS, Cemagref, Inserm, Ined, Inra, IRD, Inrets, Inria [1]
).

Au total, 4 409 personnes ont répondu au questionnaire
 [2]. L’ensemble des répondant.e.s est
constitué à la fois de chercheur.e.s (doctorant.e.s et docteur.e.s), de personnels techniques
(ingénieur.e.s, bibliothécaires, etc.), d’enseignant.e.s vacataires ou contractuel.le.s, ainsi que de
personnels administratifs (secrétaires, comptables, etc.).

Une enquête inédite. Cette enquête, à une telle échelle, et avec l’ambition de toucher tous les
métiers et l’ensemble des établissements de l’ESRP, est la première en son genre. Elle ne répond
pas à toutes les questions soulevées par la précarisation de l’ESRP mais elle apporte des
informations cruciales qui manquaient jusqu’à présent aux différents comptages établis par les
institutions de l’ESRP. Restituant les trajectoires individuelles, elle permet de saisir la réalité de la
précarité pour les personnes qu’elle concerne directement : aussi bien dans ses modalités
objectives (contrats indignes, rémunérations irrégulières et souvent basses, vulnérabilité à l’égard
des supérieur.e.s hiérarchiques, morcellement du travail) que subjectives (sentiment de ne pas
être considéré.e pour le travail effectué, difficultés à se projeter dans l’avenir). Cette enquête
repose sur la définition par les personnes elles-mêmes de ce qu’est la précarité
." (p. 13)

Pour lire ce rapport, veuillez ouvrir le document joint ou cliquer ici

Cette enquête a été pilotée pour l’intersyndicale par :

 Charles-Antoine Arnaud : ingénieur de recherche statisticien en géographie au CNRS,
laboratoire ADES (UMR 5185), Pessac.

 Isabelle Clair : chargée de recherche en sociologie au CNRS, laboratoire CRESPPA-GTM
(UMR 7217), Paris.

 Annick Kieffer : ingénieure de recherche en sociologie au CNRS, laboratoire CMH
(UMR 8097), Paris.

 Christine Roland-Lévy : professeure de psychologie sociale à l’université de Reims
Champagne-Ardenne, laboratoire de Psychologie Appliquée, LPA (EA 4298).

Le rapport a été rédigé par :

 Charles-Antoine Arnaud : ingénieur de recherche statisticien en géographie au CNRS,
laboratoire ADES (UMR 5185), Pessac.

 Florence Audier : ingénieure de recherche en économie à l’université de Paris I,
laboratoire CES-Matisse (UMR 8174).

 Isabelle Clair : chargée de recherche en sociologie au CNRS, laboratoire CRESPPA-GTM
(UMR 7217), Paris.

 Matthieu Hély : maître de conférences en sociologie à l’université Paris Ouest Nanterre La
Défense, laboratoire IDHE (UMR 8533).

 Annick Kieffer : ingénieure de recherche en sociologie au CNRS, laboratoire CMH
(UMR 8097), Paris.

 Christine Roland-Lévy : professeure de psychologie sociale à l’université de Reims
Champagne-Ardenne, laboratoire de Psychologie Appliquée, LPA (EA 4298).

 Wilfried Rault : chargé de recherche en sociologie à l’INED, Paris.

 avec la collaboration de Anne-Laure Negro, doctorante en sociologie à l’université de
Lyon 2, laboratoire GRS (UMR 5040).

Pourquoi un questionnaire sur les précaires de l’ESRP ? (extrait)

"[…] notre enquête cherche à saisir ce que signifie pour un individu l’expérience quotidienne de
la précarité. Elle en donne une vision non pas d’en haut et dans une perspective purement
comptable, mais à partir des expériences individuelles : le questionnaire ne s’intéresse pas qu’au
point de vue de l’organisation de l’ESRP mais à la signification que prend pour une personne le fait
de courir après les contrats, de devoir trouver des solutions ponctuelles de rémunération entre
deux emplois, de subir des baisses de rémunérations aléatoires, d’être considérée comme un
personnel de deuxième catégorie, de ne pas pouvoir faire d’emprunt pour s’acheter un logement,
d’hésiter à fonder une famille dans l’incertitude de son avenir professionnel, etc. En retour, c’est
un nouveau regard sur le fonctionnement de la recherche et de l’enseignement supérieur qui est
révélé : émietté, sans perspective à long terme, pour partie improductif parce que déchiré dans
les tensions entre les différents statuts de ses acteurs
et reposant pour une large part sur des
individus susceptibles pour beaucoup d’entre eux de quitter le navire afin de trouver mieux
ailleurs.
" (p. 15)

[…] "Les ministres François
Goulard puis Valérie Pécresse se sont engagés à dénombrer les précaires. Cela n’a pas été fait.
Seul le ministère pourrait effectuer un recensement des précaires qui ne tienne pas seulement
compte, comme c’est le cas dans les bilans sociaux des établissements de l’ESRP, des contrats
mais des personnes.

"

[…] "La seconde difficulté de notre entreprise résidait dans la définition de l’objet. Il ne pouvait s’agir
d’imposer une définition de la précarité qui nous aurait amenés à ne pas saisir toute la diversité
des situations que cette notion recouvre. Nous avons choisi la définition qu’en donnent les
individus eux-mêmes
. Ont répondu à cette enquête toutes les personnes qui se considèrent
comme précaires et non celles qui sont considérées statutairement comme telles
." (p. 15)

Une proposition de méthode de dénombrement des précaires aboutit à l’hypothèque qu’il y aurait entre 45 000 et 50000 personnels précaires dans l’ESRP (p. 16)

Rapport final – mode d’emploi

Ce rapport peut être lu de plusieurs manières et à
différents niveaux.

"La première partie [p. 23-40] constitue une synthèse des résultats présentés de façon plus analytique par la
suite. Elle conjugue les principales découvertes du questionnaire saisies d’un point de vue
quantitatif avec l’analyse qualitative des commentaires libres rédigés par les répondant.e.s en fin
de questionnaire. L’ensemble donne à voir l’expérience de la précarité dans sa globalité.

La deuxième partie [p. 41-82], quant à elle, revient largement sur les données concernant chaque catégorie
de personnes précaires : chercheur.e.s (doctorant.e.s et docteur.e.s), personnels techniques
(ingénieur.e.s, bibliothécaires, etc.), enseignant.e.s vacataires ou contractuel.le.s, ainsi que
personnels administratifs (secrétaires, comptables, etc.), essentiellement selon leur niveau de
diplôme, leur âge, leur sexe, leur appartenance disciplinaire et leur métier au sein de l’ESRP. Elle
présente la matière des données recueillies par le questionnaire : des tableaux et des graphiques
commentés développent les principaux résultats présentés dans un premier temps.

Enfin, des annexes [p. 87-101] viennent encore satisfaire le lecteur curieux. La première, comme il se doit,
donne accès au texte du questionnaire, dont l’architecture est commentée. La deuxième et la
troisième sont faites de tableaux et de graphiques complémentaires dont le corps du texte a été
élagué pour plus de lisibilité.
" (p. 19)


[1CNRS = Centre national de la Recherche Scientifique ; Cemagref = Institut de recherche pour l’ingénierie de
l’agriculture et de l’environnement ; Ined = Institut national d’études démographiques ; Inra = Institut national de
recherche agronomique ; IRD = Institut de recherche pour le développement ; Inrets = Institut national de recherche
sur les transports et leur sécurité ; Inserm = Institut national de la santé et de la recherche médicale ; Inria = Institut
national de recherche en informatique et en automatique.

[2Le taux de réponses non exploitables est très bas, ce qui est rare pour un questionnaire de huit pages demandant au
moins dix minutes pour être rempli.