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Annulation d’une procédure d’évaluation des enseignements à l’université Jean Moulin Lyon III (16 novembre 2009)

mardi 8 décembre 2009, par Laurence

À Lyon III, vient d’être annulée une procédure d’évaluation des enseignements que la présidence de l’université entendait mettre en oeuvre et qui violait le principe fondamental d’indépendance des enseignants-chercheurs. Ci dessous, le courrier par lequel Marc Boninchi, MCF en histoire du droit, informe ses collègues de la démarche que lui et deux de ses collègues (Serge Frossard et Catherine Pivot) avaient entreprise pour contrer cette procédure, ainsi que de son résultat. En document joint : 1. la requête auprès du président de l’université concernant les usages prévus de l’évaluation 2. le courrier du ministère précisant le caractère strictement individuel des évaluations.

LYON, LE 16 novembre 2009

Chers collègues,

Il me paraît utile de porter à votre connaissance certains éléments d’information.

Un plan d’évaluation des formations et des enseignements a été adopté par le conseil
d’administration de l’Université Jean Moulin Lyon III lors sa séance du 7 juillet 2009,
après avis favorable du Conseil des études et de la vie universitaire (CEVU).

Ce projet comportait plusieurs mesures dont un processus d’évaluation des conditions
générales d’enseignement qui ne saurait susciter aucune critique. Mais il instituait
également une procédure d’évaluation individuelle des enseignements/enseignants par
les étudiants en prévoyant expressément que les résultats de cette évaluation seraient
communiqués au responsable pédagogique du diplôme et au Doyen ou au
directeur de la composante. En tant que représentant du personnel au Comité
technique paritaire, j’ai eu l’occasion d’attirer l’attention de l’équipe présidentielle sur le
caractère illicite de cette dernière disposition en rappelant que le conseil d’Etat avait
déjà jugé que le principe d’indépendance des enseignants-chercheurs exigeait que
seul l’enseignant concerné soit destinataire des éléments résultant de l’évaluation
individuelle de son enseignement. La Haute juridiction administrative a indiqué avec
une grande clarté que les dispositions de l’arrêté du 9 avril 1997 sur l’évaluation des
formations et des enseignements ne sauraient légalement avoir pour effet de permettre
une communication à des tiers des éléments recueillis à cette occasion (CE, Sect., 29
décembre 1997, requêtes n° 188347 et 188423).

Ces avertissements n’ayant pas été entendus, je me suis vu dans l’obligation avec mes
collègues Catherine PIVOT et Serge FROSSARD - respectivement membres du CA et
du CS - de menacer d’introduire un recours pour excès de pouvoir devant le tribunal
administratif pour obtenir l’annulation de la décision du CA du 7 juillet 2009. Ce n’est
que sous cette menace, et à la suite d’une consultation du ministère ayant tranché en
notre faveur, que l’équipe présidentielle s’est résolue à faire machine arrière le 27
octobre, en demandant au conseil d’administration de l’Université d’annuler sa
précédente délibération sur l’évaluation individuelle des enseignements.

Il m’a semblé nécessaire de porter notre action à votre connaissance. L’évaluation
individuelle des enseignements par les étudiants peut présenter un intérêt si ses
modalités pratiques permettent d’organiser un simple retour d’information vers
l’enseignant concerné dans le but de lui permettre de s’améliorer. Lesdites évaluations
doivent toutefois être conduites dans le strict respect de la réglementation en vigueur et
des grands principes constitutionnels, et chacun d’entre nous peut imaginer les dérives
qui ne manqueraient pas d’apparaître si les étudiants devenaient progressivement
"maîtres" de la carrière des enseignants...

Cette affaire témoigne évidemment de la vigilance accrue dont nous devons faire
preuve dans le contexte actuel, marqué par une réforme de la gouvernance des
universités, un élargissement des pouvoirs présidentiels et une volonté de « 
modernisation » du statut des enseignants-chercheurs.

Je reste à votre disposition pour plus d’amples renseignements et vous prie de croire,
chers collègues, en l’assurance de mes meilleurs sentiments.

Marc BONINCHI
Maître de conférences en Histoire du droit
Représentant du personnel au CTP (SNESUP-FSU)