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La plus grande cité U française amputée de 819 logements - Mael Inizan, Libération, 13 octobre 2009

mardi 13 octobre 2009, par Wendy

La communauté d’agglomération des Hauts-de-Bièvre a voté la destruction d’un tiers de la cité U de Jean Zay d’Antony, invoquant sa nécéssaire réhabilitation. Les associations étudiantes craignent une opération immobilière camouflée.

Sera-t-il encore plus difficile de se loger pour les étudiants d’Ile-de-France ? Un cri d’alarme est poussé par plusieurs collectifs alors que la communauté d’agglomération des Hauts-de-Bièvre (92), propriétaire de la cité U Jean Zay d’Antony, a adopté un projet de restructuration de la résidence. A terme, en 2013, plus de 800 chambres de la cité U seront détruites, les autres devant être réhabilitées.

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« Ils ont vidé le bâtiment C en juillet. Ce n’était que la première étape, ils s’attaquent maintenant au reste de la résidence » clame Kamel, membre du collectif Halte aux Expulsions. En juillet, près de 500 étudiants, logés dans cette cité universitaire historique du sud de Paris, apprenaient en effet subitement que leur bâtiment allait être détruit. Un nouveau protocole, adopté vendredi soir par la communauté d’agglomération, prévoit la destruction de deux autres bâtiments, comptant 271 chambres.


Démolitions de 819 logements du Crous

Construite dans les années 1950, la cité universitaire de Jean Zay rassemble à elle-seule 2100 chambres, soit 16 % du parc du logement d’Ile-de-France. Cependant, pour le Crous comme pour la communauté d’agglomération, la plupart des bâtiments sont insalubres. Une centaine de chambres sont d’ailleurs condamnées, trop vétustes pour être habitées. « Il ne s’agit ici que de détruire quelques bâtiments pour mieux rénover les autres », se défend Alain Cordina, directeur adjoint du Crous de Versailles.

Pour lui, les bâtiments, à l’architecture « anachronique », ne permettent plus d’accueillir correctement les étudiants. Le protocole voté vendredi doit bouleverser l’organisation des lieux pour enfin leur offrir « de bonnes conditions de travail ». Il prévoit notamment d’agrandir les quelque 1300 logements restant : 16 m2, contre 9 m2 aujourd’hui. « De nouveaux logements seront également construits ailleurs dans le département. Pour chaque destruction, le protocole prévoit la construction de 1,2 nouveau logement », ajoute Alain Cordina, affirmant qu’aucun étudiant ne sera laissé de côté.

Un « kyste » urbain

« Mais où sont les lignes de crédit ? », interroge l’Unef. Pour le syndicat étudiant, le protocole affiche plein de « bonnes intentions », mais n’explique pas comment seront financées les rénovations, ni la construction des nouveaux logements. « On a du mal à faire confiance. D’un côté, ils ne mettent pas d’argent sur la table, de l’autre, le document n’est pas contraignant », s’inquiète David Dobbels, de l’Unef.

Pour la plupart des opposants au projet, la rénovation des résidences cache une tentative des pouvoirs locaux de remettre la main sur ce vaste terrain idéalement situé à seulement 20 minutes de Paris. « Pourquoi serait-on capables de rénover certains bâtiments et pas d’autres ? », demande Marie-Jo Weil-Erhard, membre active du collectif Sauvons Jean Zay. Contacté par Libération.fr, la communauté d’agglomération n’a pas donné de suite à notre demande d’interview. De son côté, David Dobbels ne manque pas de rappeler que Patrick Devedjian, président du conseil général des Hauts-de-Seine et signataire du protocole, affiche depuis longtemps sa volonté d’intervenir dans l’aménagement de ce territoire, le qualifiant à de maintes reprises de « kyste » urbain lorsqu’il était maire d’Antony.

« On se sent fliqué »

Au sein de la cité U, la tension est palpable. Jeudi, trois étudiants ont été sommé de quitter leurs chambres. Traumatisées par les expulsions en série de cet été, les associations sont montées au créneau, accusant le Crous de commencer à « vider » les bâtiments. « Une simple exclusion d’étudiants qui ne respectaient pas le règlement intérieur, notamment en hébergeant des gens », affirme de son côté le Crous. Gilles Ouvoughou, doctorant en science, est l’un de ces trois étudiants. Accusé d’héberger sa petite amie, il a dû faire ses cartons en quelques heures, sous le regard de quatre policiers et du commissaire d’Antony en personne. « Ils utilisent le moindre prétexte, même sans preuves et mettent des étudiants à la rue du jour au lendemain », accuse un membre d’un collectif qui s’oppose au projet.

Croisé au détour d’un couloir, Maxence, 23 ans, ne sait pas trop quoi penser de toutes les rumeurs qui circulent. Il a assisté à plusieurs expulsions et hébergé des amis qui avaient perdu leurs logements au cours de l’été. Il témoigne de la dégradation du climat, en quelques mois : « Etudiants comme administration, de chaque côté, on devient méfiants. On se sent fliqué. C’est stressant comme situation. On n’est pas trop sûrs de ce qui se passe et de comment ça va évoluer. »