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Des universitaires lancent un appel au secours, Marianne2, 7 avril 2009

mercredi 8 avril 2009

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Des universitaires lancent un appel au secours

Neuf semaines de grève. Le mouvement des universités entre dans un bras de fer sans précédent avec le gouvernement. En témoigne l’appel de Strasbourg, un appel au secours autant qu’une exhortation à la prise de conscience collective.

Neuf semaines de grève. Le gouvernement continue de souffler sur les braises d’un mouvement qui, contrairement aux apparences, ne s’essouffle pas. Pas de changements de fond sur le décret des enseignants chercheurs, pas de reculs sur la réforme du système universitaire, et des promesses dont la légèreté ne dupe pas le monde universitaire…

Une défiance envers les médias malgré des moyens de lutte originaux, le mouvement qui anime les universités n’en finit pas d’en appeler à la prise de conscience collective. Dernier en date, l’appel de Strasbourg en témoigne. Une charge solennelle qui détonne comme un appel au secours d’une corporation qui a bien conscience de l’impasse qui s’offre à elle alors que les examens à venir commencent à être remis en cause, que le décalage avec les universités étrangères pose problème.

L’appel de Strasbourg

"Nous, enseignants, enseignants-chercheurs et chercheurs, personnels administratifs et techniques de l’Université de Strasbourg, étudiants et jeunes chercheurs, nous nous adressons à l’opinion publique, à notre représentation nationale, aux partis politiques, aux organisations syndicales, aux instances européennes et à l’ensemble des médias, pour qu’ils entendent, soutiennent et relayent notre appel.
Nous, enseignants, enseignants-chercheurs et chercheurs, personnels administratifs et techniques de l’Université de Strasbourg, étudiants et jeunes chercheurs, nous nous adressons à l’opinion publique, à notre représentation nationale, aux partis politiques, aux organisations syndicales, aux instances européennes et à l’ensemble des médias, pour qu’ils entendent, soutiennent et relayent notre appel.

Trois mois après la publication de l’Appel de Strasbourg, après huit semaines de grève et de multiples manifestations, nous observons que la mobilisation la plus importante, la plus unanime et la plus longue de ces quarante dernières années continue d’être ignorée par le Gouvernement, et demeure encore mal connue par l’opinion publique. Aussi nous tenons à afficher notre soutien aux médias et aux journalistes qui ont le courage de dénoncer les nombreuses violences policières dont notre mouvement est la victime, ainsi que les mensonges du Gouvernement qui conduisent aujourd’hui à une grave désinformation. Celle-ci tend à travestir la force de notre mobilisation, la clarté de nos revendications et la teneur réelle des « réformes » imposées. Malgré les affirmations péremptoires de Pécresse et Darcos, toute la population de notre pays doit savoir qu’à ce jour aucun dossier n’est réglé, malgré quelques concessions à la marge :
la logique du décret réécrit sur le statut des enseignants-chercheurs reste celle du texte initial (ce qui a été admis par Claude Guéant lui-même).
Darcos essaye d’échanger un moratoire sur le contenu des concours contre une application immédiate de la « réforme » de la formation des enseignants.
aucune avancée n’a été obtenue dans le dossier du démantèlement des organismes publics de Recherche, ni dans les autres dossiers portés par notre mouvement (contrat doctoral unique, individualisation de carrières des personnels administratifs et techniques, externalisation des tâches).
les gels de suppressions de postes pour 2010 et 2011 ne sont que des promesses, qui n’impliquent ni retour sur les suppressions de 2009, ni réponse à notre demande d’un plan de création d’emplois statutaires scientifiques.

Le combat que les médias ont à mener et que certains d’entre eux ont entrepris est le même que le nôtre : la défense de liberté d’expression et de la libre circulation des idées contre un Gouvernement qui pratique l’artifice, la manipulation et l’intimidation. Nous l’affirmons avec gravité : la démocratie est en danger. Usant de tous les moyens de pression et de répression à sa disposition, notre Gouvernement se sert du dossier universitaire comme d’un laboratoire préparant l’extension d’une politique régressive dans tout le Service public d’Éducation et, au-delà, dans l’ensemble de la Fonction publique et dans les associations qui assurent des missions d’intérêt public.
Aussi nous prenons à témoin toute la population de notre pays de ce que notre Gouvernement ne sait répondre que par un grave déni de démocratie, par une irresponsable obstination à faire passer de mauvaises « réformes » quel qu’en soit le prix et par un refus incompréhensible d’entendre notre colère légitime et notre force de proposition.

Avec tous ceux qui nous soutiennent depuis des mois dans notre combat, avec les parents d’élèves, les élèves et les étudiants, avec toute la communauté d’Enseignement et de Recherche, de la maternelle à l’Université, qui s’est mobilisée massivement le 19 mars et encore le 2 avril, nous demandons solennellement à notre représentation nationale et à tous nos élus de relayer enfin, dans toutes les instances et assemblées, notre double demande d’un retrait sans délais de toutes les "réformes" contestées et de l’ouverture du grand débat national que le monde de l’Enseignement et de la Recherche est en droit d’attendre. Nous formulons également une demande pressante aux organisations syndicales, et en particulier à leurs directions respectives, afin qu’elles s’abstiennent de brader nos revendications dans une mascarade de négociations qui aggravent l’illisibilité et l’inapplicabilité de « réformes » mal conçues dans la plus grande précipitation. Nous les appelons à soutenir explicitement les motions de la Coordination Nationale des Universités qui exigent depuis deux mois le retrait pur et simple des "réformes" incriminées.

Nous interpellons enfin la Commission Européenne ainsi que les parlementaires européens afin qu’ils se mettent à l’écoute des aspirations et des demandes de tous ces enseignants, chercheurs et étudiants européens qui n’acceptent plus aujourd’hui, ni le sacrifice des Humanités et des Sciences Humaines et Sociales sur l’autel de « l’Économie de la connaissance », ni la dépendance accrue de la Recherche scientifique aux seules lois de la rentabilité, du marché et de l’industrie. Nous nous adressons à tous les partis politiques et tous les candidats aux élections européennes, pour qu’ils se saisissent des questions de l’Enseignement et de la Recherche, et prennent clairement position sur les « réformes » en cours, sur la nocivité de la loi LRU et de ses conséquences en chaîne, et sur l’entreprise de destruction massive du Service public engagée par le Gouvernement français."

Collectif des Appels de Strasbourg (2 avril 2009)