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À l’université de Strasbourg, la précarité organisée des étudiants vacataires - Maxime Nauche, Rue89 Strasbourg, 2 janvier 2019

mercredi 2 janvier 2019, par Laurence

Travailler sans contrat et être payé avec plusieurs mois de retard, c’est le quotidien de centaines d’étudiants embauchés chaque année par l’Université de Strasbourg. La situation est endémique et l’Unistra semble incapable d’y remédier. Pour certains étudiants vacataires, regroupés au sein d’un collectif, l’Université profite de cette précarité organisée et n’a aucune intention d’y mettre fin.

Cela fait bientôt trois mois qu’Alice ne touche pas le moindre euro. Pourtant, elle travaille dans un service administratif de l’Université de Strasbourg (Unistra) depuis fin août. Comme tous les autres étudiants embauchés par l’Unistra, Alice ne souhaite pas donner son vrai prénom par peur que son contrat ne soit pas renouvelé à la rentrée prochaine. Elle n’est pas étudiante à l’université mais dans un autre établissement à Strasbourg :

Ces quelques heures de travail par mois devaient me permettre de mettre un peu de beurre dans les épinards. Lors de mon entretien d’embauche, on m’avait prévenue qu’il y aurait des retards dans les paies, sans me donner de délai exact. Mais je ne pensais pas que ça tarderait autant.

Pas un centime de gagné depuis la rentrée

Même son de cloche du côté de Charles qui donne des cours en tant que doctorant. Pour l’année 2016-2017, il a attendu le mois de mars pour recevoir le salaire correspondant à tous les cours donnés depuis le mois de septembre. L’année dernière, il a reçu tout son salaire du premier semestre en janvier, et sa paie pour le deuxième semestre est arrivée en juin.

Si pour certains doctorants, donner des cours est un moyen de gagner en expérience, c’est aussi une source de revenus. Sauf qu’avec plusieurs mois de suite sans un centime, certains sont obligés d’avoir encore un autre emploi pour subvenir à leurs besoins financiers.

Ces centaines d’étudiants qui travaillent pour l’université n’ont pas le statut de fonctionnaire mais celui de vacataire. Ils n’ont pas un salaire fixe chaque mois mais sont payés à la tâche effectuée. Un doctorant est, par exemple, payé en fonction du nombre d’heures de cours dispensées. C’est de ce statut que découlent beaucoup de difficultés.

Attendre trois mois pour voir ses heures prises en compte

En effet, chaque service de l’Unistra recense les tâches réalisées par leurs vacataires pour pouvoir les payer. Or, d’après la direction des ressources humaines (DRH), ce recensement se fait chaque trimestre. Donc un vacataire qui travaille depuis janvier doit attendre fin mars pour voir son activité comptabilisée. Il ne sera donc pas payé avant la fin du trimestre.

Le congrès de l’université a adopté, au printemps 2016, une résolution visant à mensualiser la paie des vacataires. C’était visiblement une coquille vide puisque deux ans et demi plus tard, la paie est toujours trimestrielle, ce que regrette un membre du collectif Dicensus, qui défend les travailleurs précaires de l’enseignement supérieur et de la recherche à Strasbourg :

L’université a une approche purement comptable. Gérer les paies des vacataires chaque trimestre, c’est moins de travail pour les ressources humaines, donc ça coûte moins cher.

Des raisons économiques rejetées par Elisabeth Demont, vice-présidente de l’université aux ressources humaines, qui confirme toutefois que la mensualisation de la paie des vacataires n’est pas à l’ordre du jour. Pourtant certaines universités, comme celle de Lille, l’ont déjà mise en place.

Pour lire la sur le site de Rue89 Strasbourg.