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A la Sorbonne, « l’épreuve est annulée, bonne journée ! » - Timothée de Rauglaudre, Libération, 16 mai 2018

mercredi 16 mai 2018, par Elie

A Paris 1, des étudiants se sont à nouveau mobilisés pour faire annuler leur partiels. Dans la filière science politique, la direction brandit la menace du redoublement général. Plongée dans l’amphi où les étudiants ont voté l’annulation d’un examen.

Sur la place de la Sorbonne, un fourgon de police veille. Devant l’entrée de la fac rue Saint-Jacques, en face du lycée Louis-le-Grand, des dizaines d’étudiants attendent en file. Contrôle des sacs et des convocations pour tout le monde. « Ils ne vont jamais arriver à l’heure à leur partiel, soupire Eliott, veste bleu marine et pantalon blanc, étudiant en double licence philosophie-science politique. Ça ne se passe jamais comme ça d’habitude. Ce n’est pas normal. » Ce mercredi 16 mai, les L3 science politique doivent en principe passer leur troisième partiel, sur la théorie de la communication. Les deux premiers ont été annulés par les étudiants eux-mêmes, mobilisés contre la loi sur l’orientation et la réussite des élèves (ORE). Ce partiel doit avoir lieu dans deux amphis différents. A 8 h 45, l’un des deux, l’amphi Lefebvre, est bloqué par une dizaine d’étudiants. Les candidats se rabattent sur l’amphi de gestion. Certains portent un brassard arc-en-ciel, clin d’œil à la présence de policiers aux abords de la fac. Une idée décalée soufflée par une enseignante. « Certains profs nous sont favorables, mais ils sont muselés par la direction », affirme Eliott.

La professeure qui organise le partiel, cheveux courts et chemisier noir, prend le micro : « Je constate que l’accès à l’amphi Lefebvre est bloqué, quelqu’un souhaite prendre la parole ? » A la tribune, les interventions se succèdent. Le cheval de bataille des étudiants bloqueurs : les « conditions d’examen inéquitables », selon Eliott. Depuis le début des examens, il y a deux semaines, plusieurs unités de formation et de recherche (UFR), dont celles d’histoire et de philosophie, ont pris la décision d’annuler d’office tous les partiels pour les remplacer par des devoirs maison (DM). « La loi ORE, je m’en fous, mais ces conditions sont intenables, on est tous pénalisés », estime une étudiante qui porte un T-shirt noir et a attaché ses cheveux en chignon. Pour la majorité des étudiants qui prennent la parole, la loi qui change les conditions d’accès à l’université reste en ligne de mire. « Les partiels ont été posés par le gouvernement comme un objectif politique, affirme l’un d’entre eux. Les empêcher de se tenir, c’est s’opposer à sa politique. »

Redoublement pour tous

Seuls deux étudiants s’expriment contre l’annulation du partiel. L’issue semble connue d’avance. « Les étudiants sont dans un rapport de force avec l’administration », dénonce l’un d’eux, vêtu d’un blouson noir American College. Avant se tourner vers la prof : « Je voudrais savoir si, oui ou non, ceux qui le souhaitent pourront passer leur partiel. » Réponse neutre : « Si les conditions normales sont réunies, oui, sinon on annulera. » « Les conditions, il y en a certains qui sont assez courageux pour s’en accommoder », relance l’étudiant antiblocage. Huées. Autre opposant, Alexandre ne retient pas ses coups : « Vous êtes dans une réaction infantile ! Papa Macron a dit quelque chose, alors il faut prouver le contraire. » Il fait référence à une phrase prononcée par le président de la République lors de son interview sur TF1 le 12 avril, dont les étudiants bloqueurs ont fait un slogan : « Il n’y aura pas d’examens en chocolat dans cette République. » Une étudiante pointe du doigt l’entrée de l’amphi : « Je trouve ça scandaleux qu’il y ait un mec de la sécurité avec une oreillette qui nous suit partout. » Invité à se présenter, un homme en costume s’avance. « Je suis le directeur de cabinet du recteur. Je suis là pour observer comment ça se passe. »

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