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Modification du décret statutaire des enseignants-chercheurs : La territorialisation du statut dans le cadre des COMUE - Communiqué du SNPREES-FO, 16 septembre 2014

vendredi 19 septembre 2014

Le décret 2014-497 modifIant le décret statutaire (84-431) des enseignants-chercheurs est paru : certaines modifIcations étaient en effet rendues nécessaires pour prendre en compte les transferts de compétences vers le conseil académique pour le recrutement et les promotions induits par la loi Fioraso. Mais d’autres dispositions nouvelles aggravent encore la condition faite aux professeurs et maîtres de conférences.

Maintien des contre-réformes du ministère Pécresse

  • La modulation : en 2009 la mobilisation des enseignants-chercheurs avec leurs syndicats, en particulier le SNPREES-FO, avait arraché la garantie que la modulation ne puisse avoir lieu sans « l’accord écrit de l’intéressé », protégeant ainsi l’indépendance des enseignants-chercheurs vis-à-vis des présidents d’Universités. La nécessité de l’accord écrit est maintenue dans le nouveau décret, qui ajoute de manière redondante qu’elle est « facultative », ce qui ne change rien à la possibilité de sa mise en oeuvre : or ce que les collègues demandent avec le SNPREES-FO, c’est la suppression des dispositions relatives à la modulation.
  • En lieu et place des commissions de spécialistes élues par les pairs de la discipline, les comités de sélection composés par les présidents d’université sont également maintenus : c’est la porte toujours grande ouverte à la multiplication des postes « féchés » au nom des « politiques d’établissements ». Chaque année, de nombreux candidats brillants se voient ainsi barrer l’accès à la candidature. Il est urgent de revenir au recrutement sur la base du jugement par les pairs élus de la discipline.

De vrais reculs

De nouvelles et nombreuses possibilités de dispenses de qualification disciplinaire par les sections du CNU :

  • Pour les maîtres de conférences HDR ayant exercé des « responsabilités importantes » (« responsabilités » dont la liste, au demeurant peu restrictive, fait la part belle aux services rendus aux politiques publicitaires des directeurs d’établissements ou des gouvernements). Cette voie de contournement de la qualification disciplinaire par les sections du CNU va accaparer 1/9e des postes mis au concours, réduisant d’autant les possibilités d’accès au corps professoral pour les très nombreux MC HDR qualifiés dans leur section.
  • Pour des directeurs de recherche (DR) postulant à des emplois de Professeurs des universités (PR), la qualification par le CNU ne serait même plus nécessaire. Dans le même esprit, une nouvelle disposition permet le détachement de CR1 en MC avec la carotte du passage en hors-classe. C’est un pas de plus vers la fusion des corps de chercheurs et d’enseignants-chercheurs qui est ainsi en marche et va dans le même sens que la loi LRU2 (art. L718-14 du Code de l’Education) ouvrant la possibilité de placer les personnels des EPST sous la tutelle des futurs présidents des communautés d’universités. C’est le préalable à la disparition des corps de chercheurs et des établissements publics de recherche.
  • Quant aux candidats exerçant des fonctions équivalentes à celles de MC dans un pays étranger, non détenteurs d’une HDR, ils peuvent aussi accéder aux fonctions d’enseignant-chercheur en France sans être qualifiés dans leur section disciplinaire du CNU.

Une procédure de recrutement inégalitaire : l’audition pourra éventuellement être complétée d’une « mise en situation », éventuellement publique, aux contours fous, instaurant ainsi une inégalité de traitement dans la procédure de recrutement.

Un service partagé ou mutualisé au sein de la COMUE : le projet prévoit que le service d’un enseignant-chercheur puisse être partagé entre plusieurs établissements, en particulier dans le cadre d’une Communauté d’Universités et d’Établissements (COMUE). Avec la disparition de filières ou de diplômes disciplinaires dans certaines universités en raison de leur fusion dans des diplômes labellisés « COMUE » (rendue obligatoire par la situation financière), cette disposition, même soumise à l’accord écrit de l’intéressé, contraindra très certainement des collègues à accepter des services éclatés dans des enseignements périphériques ou non disciplinaires, de plus dans l’ aire de la COMUE, souvent très vaste, et sans remboursement des frais de déplacements… C’est la disparition de la garantie générale d’avoir un service complet dans son établissement d’affectation.

De fausses « avancées »

Au sein du recul que constitue ce décret pour notre statut, des « avancées » auraient été obtenues … C’est la fredaine que certaines organisations syndicales entonnent avec le ministère.

  • Pas de vrai droit à mutation : le nouveau décret semble prendre en compte la nécessité d’un droit à la mutation avec la possibilité pour chaque établissement de défnir un contingent de postes exclusivement réservé à la mutation, mais la mise en oeuvre effective de ce droit reste à la disposition du seul président ou directeur d’établissement.
  • Pas de droit garanti pour les personnes handicapées : introduction d’une voie réservée pour les personnes handicapées mais dont la mise en oeuvre effective, qui plus est au moyen de contrats, est laissée à la bonne volonté de chaque établissement.
  • Le « réexamen » du refus opposé par le conseil d’administration (C.A.) à l’inscription d’un collègue à titre individuel dans un centre de recherche : l’adjonction de cet alinéa octroie en réalité explicitement au C.A. un pouvoir d’injonction à propos de l’inscription de chaque enseignant-chercheur. Quant à l’éventuel « réexamen », compte tenu des calendriers de contractualisation, il n’a que très peu de chances d’aboutir. Cet ajout constitue une atteinte renouvelée à la liberté de recherche.
  • Le développement des autres voies d’accès au professorat que l’agrégation dans les sections concernées (1 à 6) : concrètement, dans la mesure où il n’y a pas de dotation supplémentaire en postes, ceci entraîne la suppression du second concours (agrégation dite « interne »), qui était pourtant une voie de promotion offerte aux MC de ces sections, et la diminution du nombre de postes ouverts au concours de l’agrégation dans les sections concernées, concours dont la caractère national, échappant au clientélisme des « politiques d’établissement », contrevient à la territorialisation de l’ESR.
  • De l’ « évaluation » quadriennale au « suivi de carrière » quinquennal : le terme d’ « évaluation » disparaît au profit de la formule « suivi de carrière », « suivi » qui implique un rapport périodique et obligatoire, qui sera accompagné dans sa transmission au CNU de l’avis de la direction de l’établissement : c’est sur cette base, soumise aux attentes locales et non aux seules obligations statutaires, que sera effectuée l’appréciation de l’ensemble du service.

Le SNPREES-FO demande le retrait de ce décret et rappelle ses revendications, seules bases sur lesquelles pourraient s’ouvrir des négociations :

Respect de l’indépendance des enseignants-chercheurs !

  • Aucune modification statutaire s’appuyant sur l’article 73 de la loi Fioraso qui (au nom de la mobilité et de l’exercice simultané des missions) peut permettre un détricotage des garanties statutaires : maintien des droits et garanties contenus dans ces statuts, en particulier maintien de l’assurance d’attribution d’un plein service dans l’établissement d’affectation.
  • Libre inscription des enseignants-chercheurs dans le centre de recherche de leur choix.
  • Maintien de la qualification par la section disciplinaire du CNU pour l’accès aux corps des maîtres de conférences et de professeurs (hors accès dérogatoires déjà prévus).
  • Plutôt qu’un très symbolique « éméritat » décerné aux MC une fois leur carrière achevée, une vraie carrière, avec des postes de PR en nombre suffisant pour tous les MC HDR qualifiés dans leur discipline.
  • Instauration d’un vrai droit à mutation, avec un tableau national de mutations établi sur la base d’un barème, sans barrière de contingentement au gré des volontés des présidents d’universités.
  • Non à la fusion des corps de chercheurs et d’enseignants-chercheurs, maintien du statut de chercheur à temps plein et à vie.
  • Garantie (et non « possibilité »), pour tous les enseignants-chercheurs, d’un CRCT d’au moins 1/2- service au moins tous les 6 ans.
  • Maintien de la définition des obligations en termes d’activité de recherche et de services d’enseignement devant des étudiants, aucune modulation des services.
  • Maintien de la liberté pédagogique des universitaires (notamment aucune obligation d’avoir recours à l’enseignement numérique ni de participer au développement de l’enseignement « non-présentiel »).
  • Abrogation des dispositions contestées des décrets de 2008 (comités de sélection) et de 2009.