Accueil > Pratiques du pouvoir > Les "politiques" > Dossier : positions des candidats à la présidentielle sur l’enseignement (...)

Dossier : positions des candidats à la présidentielle sur l’enseignement supérieur et la recherche

mardi 13 mars 2012, par PCS (Puissante Cellule Site !)

Ce dossier est en cours de constitution et ne prétend donc pas à l’exhaustivité.

Réponse d’Eva Joly au mensuel du SNESUP – FSU

À lire sur le site de la candidate

Envisagez-vous l’abrogation de la loi LRU ? Par quelles mesures immédiates et à plus long terme, engagez-vous un changement de cap garantissant un fonctionnement des établissements fondé sur une collégialité démocratique et assurant aux universités et laboratoires des financements d’Etat stables et pérennes ?

Je m’engage à associer autonomie et démocratie dans l’enseignement supérieur. La LRU et le pacte pour la recherche seront remplacés par un texte fondé sur les conclusions d’Etats Généraux de l’ESR, ouverts sur la société. Ce texte devra réaffirmer et installer les principes de collégialité propres à l’Université, et les généraliser aux structures fédératives régionales qui permettront d’accélérer la résorption du clivage entre Universités et Ecoles. Le statut dérogatoire de Grand Etablissement sera supprimé. Les moyens du Grand Emprunt seront reconvertis en crédit budgétaires, et l’ANR ne conservera qu’une fraction de son budget actuel, réservé aux actions fortement pluridisciplinaires ou relevant de thématiques prioritaires décidées lors d’un débat démocratique. L’AERES sera supprimée, les évaluations étant conduites par des comités élus aux 2/3 au moins et respectant la diversité des productions scientifiques.

Pour rompre avec le processus inégalitaire actuel des Idex, Labex,…, quelles mesures institutionnelles et quels moyens budgétaires (y compris en emplois) comptez-vous mettre en oeuvre, dès la prochaine rentrée, pour assurer un développement équilibré sur l’ensemble du territoire du service public d’enseignement supérieur et de recherche ? Quels sont les objectifs qui seront assignés à ce service public ?

Le système public de l’ESR doit produire et transmettre les connaissances, en toute indépendance et sur l’ensemble du territoire. Avec les écologistes, je veillerai à conserver un maillage complet, fondé sur des regroupements d’universités ou des structures fédérales démocratiques, tous dotés de moyens fondés sur l’évaluation contradictoire de leurs besoins. L’association des cycles Licence, Master et Doctorat sera réaffirmée, le statut des IUT garanti par la loi. Une loi de programmation budgétaire pour le quinquennat intégrera une augmentation d’1 G€ par an du budget du MESR. Le statut de fonctionnaire n’est pas seulement une garantie du service public, il est aussi un atout pour la qualité du travail de recherche et son indépendance : 5000 postes seront crées chaque année pour résorber la précarité.

Comptez-vous abroger la « réforme » de la formation des enseignants ? Quelles mesures pensez-vous prendre pour engager, dès la rentrée 2012, une tout autre réforme associant une véritable formation professionnelle à une formation universitaire en s’appuyant sur le potentiel des IUFM et des UFR ?

La réforme actuelle impose un véritable parcours d’obstacles et crée les conditions d’une pénurie du recrutement. Il faut refonder totalement l’entrée dans le métier, en articulant étroitement concours, formation initiale et formation continue. EELV propose trois types de concours : le premier aura lieu après la licence et ouvrira sur deux années de formation professionnelle en alternance débouchant sur un mastère. Le deuxième type sera ouvert aux candidats déjà titulaires d’un mastère et le troisième à ceux qui auront une expérience professionnelle reconnue par la Validation des Acquis de l’Expérience : ils donneront droit à une année de formation débouchant sur un mastère d’enseignement et une titularisation. C’est en proposant du temps de formation après le concours que les nouveaux enseignants pourront réellement analyser leurs pratiques, s’initier aux différentes facettes du métier, rencontrer tous les acteurs éducatifs et s’initier à une authentique démarche de recherche.


Réponse de Jean-Luc MELENCHON au questionnaire du SNESUP

A lire sur le site de campagne du candidat

Les questions sont les suivantes :

1) Envisagez-vous l’abrogation de la loi LRU ? Par quelles mesures immédiates et à plus long terme, engagez-vous un changement de cap garantissant un fonctionnement des établissements fondé sur une collégialité démocratique et assurant aux universités et laboratoires des financements d’Etat stables et pérennes ?

La LRU est l’outil privilégié des libéraux pour imposer la marchandisation et la mise en concurrence de l’enseignement supérieur et de la recherche. Désormais, les universités luttent entre elles et en leur sein pour vivre. Elles doivent se plier au diktat de la compétition en lieu et place de la coopération qui devrait prévaloir dans ce monde du savoir. L’Université est le lieu de l’universalisme et du savoir. Or le savoir est la seule chose qui se multiplie quand on la partage. Je restaurerai ce cycle vertueux.

Cela demandera bien sûr de préparer la construction d’une nouvelle loi dont le vote interviendrait en même temps que l’abrogation de cette sinistre LRU. La méthodologie de travail revêt autant d’importance à mes yeux que le contenu de la future loi, dans l’optique d’y faire adhérer l’ensemble de la communauté. Ainsi, en tout premier lieu, il faut, d’une part, procéder à une évaluation critique des dégâts et des mesures immédiates de réparation nécessaires et, d’autre part, charger le CNESER et le CoNRS d’organiser au sein de toute la communauté de l’ESR l’ébullition intellectuelle indispensable à l’émergence de la loi.

2) Pour rompre avec le processus inégalitaire actuel des Idex, Labex,…, quelles mesures institutionnelles et quels moyens budgétaires (y compris en emplois) comptez-vous mettre en oeuvre, dès la prochaine rentrée, pour assurer un développement équilibré sur l’ensemble du territoire du service public d’enseignement supérieur et de recherche ? Quels sont les objectifs qui seront assignés à ce service public ?

Les Idex, Labex et autres « Bidulex » visent aujourd’hui à créer des territoires d’exception au sein de la République pour mieux conforter la concurrence libre et non faussée internationale. La concurrence est mise en place au niveau international pour se traduire ensuite en une lutte entre étudiants. La concentration comme mode d’organisation privilégié doit donc être interrompue. À l’occasion de l’élaboration de la nouvelle loi, nous redéfinirons le périmètre des Idex et transformerons ceux-ci en pôles de coopération. Mais, pour cela, la question des moyens se pose avec acuité après les ravages du quinquennat de Nicolas Sarkozy. Ce sont donc 5 000 emplois statutaires par an pendant 5 ans qu’il faudra envisager pour remettre sur les rails un service public qui vise l’élévation du niveau culturel, scientifique et des qualifications de l’ensemble d’une classe.

3) Comptez-vous abroger la « réforme » de la formation des enseignants ? Quelles mesures pensez-vous prendre pour engager, dès la rentrée 2012, une tout autre réforme associant une véritable formation professionnelle à une formation universitaire en s’appuyant sur le potentiel des IUFM et des UFR ?

Une nouvelle réforme de la formation des enseignants doit voir le jour pour remplacer ce dispositif absurde qui nie la nature même de l’acte d’enseigner. Celle-ci articulera formation de haut niveau dans la ou les disciplines à enseigner, formation professionnelle et ouverture à la recherche. Elle s’appuiera sur des pré-recrutements afin de permettre aux jeunes issus de milieux populaires d’accéder au métier. Le statut de fonctionnaire d’État, garantie de la liberté pédagogique et de l’égale qualité du service public sur tout le territoire, sera renforcé. Parallèlement, la recherche en éducation doit être relancée, la formation continue rétablie, et des temps d’échanges pédagogiques, de réflexion et d’élaboration institués dans les établissements.

JL Mélenchon

Voir aussi l’appel d’un Front de Gauche de l’Enseignement supérieur et de la Recherche

Philippe Poutou, candidat du NPA

Pour lire les arguments du candidat sur son site de campagne

L’enseignement Supérieur et la Recherche (ESR) est l’un des grands thèmes de la campagne présidentielle. Sarkozy présente les réformes du secteur comme l’une des principales réussites de son mandat. Pourtant, à deux reprises, les personnels de l’ESR, avec les étudiants, se sont mobilisés contre la politique du gouvernement en 2007 et 2009. Le refus de la « Loi relative aux libertés et responsabilités des universités » (LRU) a été très majoritaire dans le milieu et le gouvernement est passé en force pour accélérer la transformation du milieu universitaire. Le but est bien de soumettre l’ESR aux exigences du marché, ceci au détriment du service public, de la qualité de l’enseignement, de l’indépendance et de la liberté de la recherche. En effet, les attaques contre l’ESR sont à l’image de l’ensemble de la politique du président sortant :

- L’« autonomie » des établissements (loi LRU) n’est qu’une mise en concurrence, dans un cadre de restriction budgétaire. Elle conduit paradoxalement à la mise sous tutelle de nombreux établissements qui n’arrivent plus à équilibrer leur budget. Cette mise en concurrence est renforcée par le financement des projets scientifiques sur appel d’offre et à court terme.

- Tout est fait au prétexte de l’« excellence », qui se résume à apparaître dans les classements internationaux de type Shanghai. La « visibilité internationale » semble l’unique objectif du ministère et de son principal relais, la Conférence des présidents d’université. Pour y faire quoi ? L’attribution des financements dits « d’excellence » (Equipex, Labex, Idex) dessine une carte universitaire élitiste qui délaisse des régions entières (par exemple le Grand Ouest).

- En fait, c’est bien une soumission du secteur aux intérêts privés qui s’opère : financement des recherches ayant un débouché économique immédiat, généralisation des filières professionnalisantes pour les étudiants, pilotage du secteur par le patronat qui a fait son entrée massive dans les conseils d’administrations au détriment des élus personnels et étudiants.

- L’emploi précaire explose (20% du secteur), pour les personnels administratifs et techniques comme pour les « jeunes » chercheurs, qui enchaînent les CDD souvent bien au-delà de 30 ans. Le nombre d’agents non statutaires a dépassé les 50 000 selon l’intersyndicale de l’ESR et se chiffre continue d’augmenter dans un contexte où l’emploi devient la variable d’ajustement des budgets des universités et des organismes de recherche.

- La Révision Générale des Politiques Publiques (RGPP) s’applique avec brutalité dans les organismes de recherche (CNRS, INSERM,…). En restructurant les services administratifs, en externalisant certains métiers, la RGPP va entraîner la perte de centaines d’emplois et va dégrader les conditions de travail.

- Avec la « masterisation », la formation des enseignants du primaire et du secondaire a été détruite, les IUFM démantelés. La situation dans les écoles, les collèges et les lycées s’en trouve dégradée.

- La circulaire Guéant et plus largement la chasse aux étrangers a mis dans des situations inhumaines des milliers d’étudiants.

Sarkozy parvient pourtant à se vanter d’un tel bilan, quitte à le maquiller. Les mensonges les plus grossiers n’effraient pas le tout nouveau « candidat du peuple ». Virer ce président des riches est une urgence. Suffit-il alors de voter Hollande ? Le candidat socialiste n’entend pas revenir sur les réformes du dernier quinquennat et veut poursuivre les politiques de libéralisation du secteur, au risque de s’affronter avec le monde universitaire qui s’est massivement mobilisé en 2009.

Les initiatives se multiplient pour construire un rapport de force et imposer une autre politique universitaire au prochain gouvernement, quel qu’il soit. Les personnels de la recherche ont manifesté devant le CNRS le 17 février, un appel de l’enseignement supérieur et de la recherche (personnels et étudiants) reçoit 1000 signatures par jour depuis le 23 février. Les « dix principes et objectifs » de cet appel sont très proches de notre programme d’urgence pour l’enseignement supérieur et la recherche (http://www.npa94.org.esr).
Notre programme d’urgence pour l’enseignement supérieur et la recherche :

Contre le néolibéralisme
- Abrogation des contre-réformes : LRU et pacte pour la recherche, LMD, Contrat Doctoral Unique et Masterisation
- Dissolution des agences de mise en concurrence : ANR et AERES
- Sortie du processus de Bologne et de la stratégie de Lisbonne
- Pour un grand service public de l’enseignement supérieur et de la recherche, sur tout le territoire, indépendant des intérêts du patronat et des marchés.

Pour les personnels

- Un plan de titularisation massif de tous les précaires dans la fonction publique. Dans l’ESR, nous revendiquons l’intégration à la fonction publique des 50 000 agents non statutaires et l’embauche de 100 000 personnels supplémentaires
- Pas de salaires en dessous de 1700 euros net, augmentation de 300 euros pour toutes et tous
- Financement pour tous les doctorants pendant toute la durée de la thèse : augmentation du nombre de financements et octroi, excepté pour celles et ceux qui sont déjà insérés et ne souhaitent pas rejoindre l’ESR, d’un statut de fonctionnaire stagiaire, sans cloisonnement des carrières (ingénieur, administratif, enseignant, chercheur...)
- Pour une véritable politique d’amélioration de leurs conditions de travail, d’hygiène et de sécurité

Pour les étudiants
- Allocation d’autonomie au niveau du SMIC
- Construction massive de résidence pour un logement étudiant décent pour toutes et tous
- Maintien du cadre national des diplômes, reconnaissance de ces diplômes dans les conventions collectives
- Des papiers pour tous les étudiants : carte d’étudiant = carte de séjour
Pour toutes et tous, une véritable politique de prévention et de prise en compte des violences et des souffrances subies (stress, mal-être, agressions, harcèlement) . Dans le cadre d’un service public de la petite enfance dont le NPA propose la création, nous revendiquons la création de crèches pour des universités, gratuites et accessibles à tous sans sélection

Pour la recherche
- Financement récurent des équipes permettant de mettre en place une recherche dans la durée. Suppression du crédit-impôt-recherche.
- Retrait de la RGPP et des « plans d’action » qui la mette en place dans les organismes de recherche
- Financement sur projet pour les nouvelles pistes ou thématiques, pour les nouvelles collaborations et les jeunes chercheurs

Pour la démocratie et la liberté d’expression
- Contre la censure des débats par les présidents d’université (notamment sur la question de la Palestine)
- Contre la présence du patronat dans les conseils d’administration, pour des conseils élus uniquement par les personnels et les étudiants
- Pour la liberté de recherche, d’expression et la mise de moyens à disposition (salles, panneaux d’affichages…)

L’application d’un tel programme ne viendra pas d’en haut. Seuls les personnels du secteur, de toutes les catégories, en lien avec les étudiants, pourront l’imposer. Avant, pendant et après l’élection, les militants du NPA, œuvreront à la construction et à la convergence des mobilisations afin d’en finir avec ces contre-réformes et pour le développement d’un service public de l’enseignement supérieur et de la recherche critique, populaire et émancipateur.

Lire aussi :

« Recherche et universités dans la présidentielle : livres et revues » ici

« Revue de presse sur les programmes des candidats à la présidentielle l’enseignement supérieur »

Discours de F. Hollande au biopôle de Nancy sur l’enseignement supérieur et la recherche, 5 mars 2012

• « L’indispensable refondation du système français de recherche », tribune d’EELV
et « Un moratoire sur les Idex est indispensable - Communiqué Europe Ecologie / Les Verts du 7 octobre 2011 »