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Grand emprunt : trop tôt pour un bilan ? - Philippe Jacqué, blog "Peut mieux faire", Le Monde.fr, 7 avril 2011

samedi 9 avril 2011, par Elie

Louis Vogel, le président de la Conférence des présidents d’université (CPU), a réussi à relancer la polémique sur le grand emprunt dans son entretien du 5 avril dans Le Monde. Il a en effet redonné de la voix aux opposants des investissements d’avenir. Dans un communiqué, Sauvons la recherche et Sauvons l’université (respectivement SLR et SLU) interpellent vivement Louis Vogel, et ses deux acolytes de la CPU, Anne Fraïsse et Yvon Berland. Les deux associations avaient récemment organisé une installation pour dénoncer cette initiative présidentielle (voir photo).

Dans leur dernière missive, les collectifs demandent : “Jusqu’où la CPU acceptera-t-elle la destruction de l’Université comme lieu d’élaboration et de transmission des savoirs ? La mascarade du grand emprunt doit cesser. C’est à la CPU de l’affirmer. Toute autre position ferait d’elle la co-responsable du désastre en cours.

Reste qu’après la présentation des premiers résultats d’appels d’offres (équipements d’excellence, laboratoires d’excellence (labex), initiatives d’excellence, instituts hospitalo-universitaires (IHU), cohortes, etc.), peut-on tirer un véritable bilan ? “C’est beaucoup trop tôt”, répondent en coeur Valérie Pécresse et René Ricol, interrogés séparément par Le Monde après les déclarations de M. Vogel. Pour la ministre de l’enseignement supérieur, “nous avons pour l’instant une vision partielle du processus. Il est prématuré de tirer un bilan. Ce n’est pas au démarrage que l’on voit la photographie finale”.

En juin, un premier bilan sera tiré

Pour le commissaire général à l’investissement, “nous ne sommes qu’au tout début du processus. Moins d’un tiers des financements ont été alloués… De nombreux appels d’offres seront encore ouverts. En juin, à la fin de la première vague des appels à projets, il sera temps de tirer un bilan plus objectif.

Cependant, les premiers résultats, concernant des labex notamment, ont étonné plus d’un universitaire. “Nous avons également été surpris par les choix du jury international mais contrairement à ce que le président de la CPU dit, ce jury n’a pas privilégié la seule excellence, mais d’abord les projets innovants, confie M. Ricol. C’est pour cette raison que la liste des 83 projets classés A et A+ a été complétée avec l’accord du président du jury, à la demande du comité de pilotage, par 17 projets classés B, mais scientifiquement exceptionnels. Nous avons en cela respecté la procédure qui consiste à accepter tous les projets choisis par le jury, permettre au comité de pilotage de faire des propositions de complément, et s’en remettre à la décision finale exprimée par le président du jury”. Pour la petite histoire, le comité de pilotage a proposé 25 projets de labex supplémentaires, dans lesquels le jury a sélectionné 17 lauréats.

Les lettres, pas oubliées

S’il y a eu des surprises, considère Mme Pécresse, ce n’est pas un mal. Voir qu’Amiens ou Caen ont obtenu des laboratoires d’excellence est plutôt une bonne surprise. En recourant aux jurys internationaux, nous avons déverrouillé le système. Et c’est l’ensemble du territoire qui en tire bénéfice.” Ce que réfutait M. Vogel. “L’engagement du gouvernement était de financer les meilleurs projets, où qu’ils soient, rappelle M. Ricol. Il existe peut être des zones sans labex, mais cette première vague ne permet pas de dire qu’à la fin du processus il y aura des déséquilibres géographiques forts. Qui aurait pensé que sept labex seraient sélectionnés à Montpellier, quatre à Paris-Est, trois à Clermont-Ferrand, un à Limoges ou un en Guyane ? Même si la région parisienne ou Rhône-Alpes récoltent de nombreux projets, les autres projets innovants ont été repérés.

Sur l’absence de certaines disciplines, comme le droit ou la gestion, qui n’ont obtenu qu’un labex, M. Ricol est catégorique : “sur ces disciplines, souvent déjà soutenues par le secteur privé, je ne suis pas sûr qu’il faille dix labex, même si tous les projets seront bien sûr évalués de manière indépendante par les jurys… Quant aux lettres, elles sont bien présentes dans plusieurs labex liés à l’art (Paris-VIII), au patrimoine (Versailles-Saint-Quentin) ou aux sciences humaines (Aix-Marseille)”.

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